DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

15 octobre 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative smart:)things – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 – Article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 – Article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑48/19,

smart things solutions GmbH, établie à Seefeld (Allemagne), représentée par Me R. Dissmann, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Söder, MM. H. O’Neill et V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Samsung Electronics GmbH, établie à Schwalbach/Taunus (Allemagne), représentée par Mes T. Schmitz, M. Breuer et I. Dimitrov, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 20 novembre 2018 (affaire R 835/2018-4), relative à une procédure de nullité entre Samsung Electronics et smart things solutions,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović, président, P. Škvařilová‑Pelzl et M. I. Nõmm (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,      

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 janvier 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 8 mai 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 8 mai 2019

à la suite de l’audience du 11 juin 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 6 mars 2013, la requérante, smart things solutions GmbH, a obtenu de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)], l’enregistrement de la marque figurative reproduite ci-après :

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2        Les produits et les services pour lesquels la marque contestée avait été enregistrée relevaient des classes 9, 20 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services au fin de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils et instruments scientifiques, nautiques, topographiques, photographiques, cinématographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection), de secours et d’enseignement ; appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; supports d’enregistrement magnétiques, disques acoustiques ; caisses enregistreuses, machines à calculer, équipement et ordinateurs pour le traitement de données ; extincteurs ; supports pour téléphones et supports pour téléphones portables, téléphones à puce, dispositifs d’informatique mobile, tablettes ; stations de chargement pour téléphones mobiles, smartphones, ordinateurs mobiles, tablettes électroniques ; stations d’accueil pour téléphones mobiles, smartphones, autres articles, en particulier dans le domaine de la photo, de la vidéo, de l’audio, des ordinateurs et des télécommunications » ;

–        classe 20 : « Meubles, glaces (miroirs), cadres ; produits, non compris dans d’autres classes, en bois, liège, roseau, jonc, osier, corne, os, ivoire, fanon de baleine, écaille, ambre, nacre, écume de mer, succédanés de toutes ces matières ou en matières plastiques » ;

–        classe 35 : « Publicité ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; présentation de produits dans les médias de communication pour le commerce de détail ; rassemblement de diverses marchandises (à l’exception de leur transport) pour le compte de tiers afin de faciliter la visualisation et l’achat de ces marchandises par le client ; services de magasins de vente au détail, points de vente en gros et magasins de vente par correspondance d’appareils et d’instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, photographiques, cinématographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle, de secours (sauvetage) et d’enseignement, appareils et instruments de conduction, de commutation, de transformation, de stockage, de régulation et de contrôle de l’électricité, appareils d’enregistrement, de transmission et de reproduction de sons et d’images, supports d’enregistrement magnétiques, disques acoustiques, caisses enregistreuses, machines à calculer, appareils pour le traitement de l’information et ordinateurs, extincteurs d’incendie, supports pour téléphones mobiles, smartphones, ordinateurs mobiles, tablettes électroniques, stations de chargement pour téléphones mobiles, smartphones, ordinateurs mobiles, tablettes électroniques, stations d’accueil pour téléphones mobiles, smartphones, autres articles, en particulier dans le domaine de la photo, de la vidéo, de l’audio, des ordinateurs et des télécommunications, meubles, glaces (miroirs), cadres, produits en bois, liège, roseau, jonc, osier, corne, os, ivoire, fanon de baleine, écaille, ambre, nacre, écume de mer et leurs succédanés ou en matières plastiques ; distribution (vente) via des supports électroniques d’appareils et d’instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, photographiques, cinématographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle, de secours (sauvetage) et d’enseignement, appareils et instruments de conduction, de commutation, de transformation, de stockage, de régulation et de contrôle de l’électricité, appareils d’enregistrement, de transmission et de reproduction de sons et d’images, supports d’enregistrement magnétiques, disques acoustiques, caisses enregistreuses, machines à calculer, appareils pour le traitement de l’information et ordinateurs, extincteurs d’incendie, supports pour téléphones mobiles, smartphones, ordinateurs mobiles, tablettes électroniques, stations de chargement pour téléphones mobiles, smartphones, ordinateurs mobiles, tablettes électroniques, stations d’accueil pour téléphones mobiles, smartphones, autres articles, en particulier dans le domaine de la photo, de la vidéo, de l’audio, des ordinateurs et des télécommunications, meubles, glaces (miroirs), cadres, produits en bois, liège, roseau, jonc, osier, corne, os, ivoire, fanon de baleine, écaille, ambre, nacre, écume de mer et leurs succédanés ou en matières plastiques ; distribution (vente) de produits de consommation, d’accessoires et autres articles dans le domaine de la photo, de la vidéo, de l’audio, des ordinateurs et des télécommunications ».

3        Le 29 février 2016, l’intervenante, Samsung Electronics GmbH, a introduit auprès de l’EUIPO une demande de nullité de la marque contestée, sur le fondement de l’article 52, paragraphe 1, sous a), et de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009 [devenus article 59, paragraphe 1, sous a), et article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001], pour l’ensemble des produits et services.

4        Le 8 mars 2018, la division d’annulation a rejeté la demande de nullité dans son intégralité.

5        Le 7 mai 2018, l’intervenante a formé un recours contre la décision de la division d’annulation, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001.

6        Par décision du 20 novembre 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’annulation et a annulé la marque contestée pour l’ensemble des produits et des services pour lesquels elle avait été enregistrée. Deux motifs absolus de refus étaient retenus au fondement de la décision attaquée. Après avoir mentionné que le public pertinent était composé de consommateurs moyens à la fois du grand public et du public spécialisé, de toutes les régions de l’Union dans lesquelles les mots anglais élémentaires étaient compris, ladite chambre a indiqué que le premier motif absolu était fondé sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. Elle a souligné que les éléments verbaux « smart things » étaient descriptifs des produits et des services visés par cette marque au motif qu’ils désignaient une technologie intelligente ou une sophistication d’un point de vue technologique dont étaient dotés ces produits et services, ou qu’ils présentaient une caractéristique des produits en question, à savoir qu’ils étaient « à la mode, chic ». Quant à l’élément figuratif « :) », elle a relevé qu’il s’agissait d’un « smiley positif », que son utilisation était notoirement généralisée, qu’il n’était pas un phénomène récent et qu’il renforçait le message selon lequel les produits disposaient de caractéristiques positives et avancées. Le second motif absolu de refus était fondé sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. D’une part, cette chambre a relevé l’absence de caractère distinctif de ladite marque en raison du caractère descriptif de celle-ci. D’autre part, elle a souligné que la connotation laudative de l’élément verbal « smart » conjointement à la connotation laudative et exclusivement positive de l’émoticône rendait le signe dépourvu de caractère distinctif. Elle a donc conclu que le signe dans son ensemble ne contenait aucun élément qui, au-delà du sens manifestement élogieux assurant la promotion des produits et des services en question, aurait permis au public pertinent de mémoriser facilement et immédiatement le signe en tant que marque distinctive pour les produits et services revendiqués.

  Procédure et conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

8        L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        À l’appui du recours, la requérante invoque quatre moyens tirés, en substance, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, le troisième, de la violation des principes d’égalité de traitement et de bonne administration et le quatrième, de la violation de l’article 95, paragraphe 1, dernière phrase du même règlement.

 Sur le premier moyen, tiré, en substance, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001

10      Dans le cadre du premier moyen, la requérante réfute le caractère descriptif de la marque contestée. Elle fait valoir que l’élément verbal « smart » et l’élément figuratif « :) » ne peuvent être directement rattachés aux produits et aux services visés par ladite marque, ces deux éléments étant avant tout associés aux êtres humains ou aux êtres vivants. Concernant l’élément verbal « smart », elle estime que le grand public ne pouvait, tout au moins à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de cette marque, établir un rapport direct entre la qualité d’« intelligence » et une matière non vivante. Selon elle, il en est de même pour l’émoticône qui traduit des émotions positives, lesquelles ne peuvent être exclusivement associées qu’aux êtres humains. Elle souligne de surcroît que l’émotion véhiculée par l’émoticône ne saurait être interprétée comme laudative, puisque le public pertinent penserait à un sourire humain et ne le verrait pas comme une déclaration positive concernant la valeur et la qualité des produits et des services concernés. Cet élément ne serait donc en rien descriptif et le serait encore moins en combinaison avec les autres éléments de la marque en cause. La requérante en conclut, d’une part, que la marque en question n’est pas uniquement composée d’éléments descriptifs, contrairement à ce que requiert la jurisprudence. Elle souligne, d’autre part, que, en tout état de cause, le lien aisément identifiable entre le signe et les produits ou services tel qu’imposé par la jurisprudence n’existe pas en l’espèce, puisque le consommateur pertinent doit se soumettre à un processus de réflexion.

11      L’EUIPO et l’intervenante réfutent ce moyen.

12      Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, doivent être refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, à désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation de service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. Conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, il suffit que ce motif absolu de refus existe dans une partie de l’Union.

13      L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que ces signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque et qu’une entreprise monopolise l’usage d’un terme descriptif, au détriment des autres entreprises, y compris de ses concurrents, dont l’étendue du vocabulaire disponible pour décrire leurs propres produits se trouverait ainsi réduite [voir arrêt du 25 novembre 2015, Ewald Dörken/OHMI – Schürmann (VENT ROLL), T‑223/14, non publié, EU:T:2015:879, point 20 et jurisprudence citée].

14      Il importe également de relever que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la perception d’un public ciblé, qui est constitué par le consommateur de ces produits ou de ces services [arrêts du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, EU:T:2002:41, point 38, et du 22 mai 2008, Radio Regenbogen Hörfunk in Baden/OHMI (RadioCom), T‑254/06, non publié, EU:T:2008:165, point 33 ; voir, également, arrêt du 17 mai 2011, Consejo Regulador de la Denominación de Origen Txakoli de Álava e.a./OHMI (TXAKOLI), T‑341/09, EU:T:2011:220, point 20 et jurisprudence citée].

15      Ainsi, pour qu’un signe tombe dans le champ d’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, il faut qu’il présente avec les produits ou les services qu’il désigne un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de ces produits ou de ces services ou l’une de leurs caractéristiques [voir arrêt du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, EU:T:2005:247, point 25 et jurisprudence citée].

16      Il convient également rappeler qu’une marque constituée d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive desdites caractéristiques, sauf s’il existe un écart perceptible entre le mot et la simple somme des éléments qui le composent, ce qui suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime la somme desdits éléments [arrêts du 25 février 2010, Lancôme/OHMI, C‑408/08 P, EU:C:2010:92, point 62 ; du 30 janvier 2015, Siemag Tecberg Group/OHMI (Winder Controls), T‑593/13, non publié, EU:T:2015:58, point 29, et du 12 mars 2019, Novartis/EUIPO (SMARTSURFACE), T‑463/18, non publié, EU:T:2019:152, point 22].

17      C’est à la lumière de ces principes communs au motif absolu de refus de l’enregistrement, tel que prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, et à la cause de nullité absolue, telle que prévue à l’article 59, paragraphe 1, sous a), dudit règlement, qui renvoie à l’article 7 du même règlement, qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante selon lesquels, contrairement à ce qui a été retenu dans la décision attaquée, la marque contestée ne serait pas de nature descriptive [voir, en ce sens, arrêt du 29 mai 2018, Sata/EUIPO – Zhejiang Rongpeng Air Tools (2000), T‑301/17, non publié, EU:T:2018:311, point 35].

 Sur le public pertinent

18      La chambre de recours relève, au point 14 de la décision attaquée, que les produits et services visés par la marque contestée s’adressent au grand public et à un public spécialisé dans le domaine des technologies de l’information et dans celui des affaires. Elle souligne que, l’expression étant composée de termes appartenant au vocabulaire élémentaire de l’anglais couramment utilisé dans le domaine des technologies de l’information et de la télévision ou des transactions commerciales internationales, le motif de nullité n’est donc pas limité aux États membres dont l’anglais est la langue officielle, mais s’étend à toutes les régions de l’Union européenne dans lesquelles les mots anglais élémentaires sont compris. Ces considérations au demeurant non contestées par la requérante sont exemptes d’erreur.

 Sur les éléments verbaux « smart » et « things »

19      La requérante soutient que les éléments verbaux de la marque contestée ne sont pas descriptifs des produits et des services que celle-ci vise et que, prise dans son ensemble, ladite marque ne saurait pas non plus être descriptive. En premier lieu, elle fait valoir que l’élément verbal « smart » était attribué, à tout le moins à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de cette marque, aux humains et non aux produits et services concernés. En second lieu, s’agissant de l’élément verbal « things », elle indique, dans l’exposé des faits de la requête, qu’elle avait fait valoir dans ses observations devant la chambre de recours que, à la différence des termes « smart phone », « smart tv » et « smart home », ledit élément verbal constituait un terme plus large, plus vague et sans signification particulière et que les termes « smart things » ne savaient en tout état de cause pas viser les services relevant de la classe 35 visés par la marque contestée étant donné que le terme « things » désignait des objets tangibles.

20      En premier lieu, les arguments de la requérante concernant l’élément verbal « smart » ne sauraient prospérer.

21      En effet, premièrement, la chambre de recours a souligné à juste titre, au point 21 de la décision attaquée, que l’élément verbal « smart » désignait une technologie intelligente qui, outre l’intelligence artificielle, vise aussi « toute caractéristique technologique allant au-delà des caractéristiques “traditionnelles” des produits ». En ce sens, il convient d’admettre que ledit élément verbal est descriptif des produits et des services visés par la marque contestée. En ce qui concerne tout d’abord les produits relevant de la classe 9, il s’agit de produits électroniques ou sophistiqués d’un point de vue technologique qui peuvent présenter des fonctionnalités intelligentes, ainsi que cela ressort du point 37 de ladite décision. Il convient de noter à cet égard que, parmi ces derniers produits, l’un de ceux-ci fait explicitement référence à la notion de « smart », à savoir les « smartphones ».

22      Ensuite, l’élément verbal « smart » peut également revêtir une signification descriptive pour les produits relevant de la classe 20 visés par la marque contestée, ceux-ci pouvant, comme l’indique le point 38 de la décision attaquée, faire partie des objets sophistiqués d’un point de vue technologique. La chambre de recours illustre à juste titre sa considération en se référant à des meubles ou des miroirs qui s’adaptent électroniquement à certaines conditions, qui peuvent être contrôlés à distance, ou qui peuvent s’autocontrôler grâce à des applications logicielles intelligentes.

23      Enfin, doit être approuvé le raisonnement figurant aux points 41 à 43 de la décision attaquée concernant les services relevant de la classe 35 visés par la marque contestée. En effet, s’agissant des services de vente au détail ou en gros de produits relevant des classes 9 et 20, il y a lieu de considérer que ladite marque indique seulement que des produits présentant la caractéristique d’être « smart » sont disponibles au point de vente au détail. En ce qui concerne les autres services, à savoir ceux de publicité et de gestion commerciale, ils font référence soit à des produits intelligents, soit la manière « intelligente » de fournir ces services.

24      Dans ce contexte, il y a lieu de relever que la requérante n’a nullement étayé son affirmation selon laquelle, à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, le public pertinent n’attribuait la qualité de « smart » qu’aux êtres humains ou aux êtres vivants et non aux produits. Ainsi que le mentionne la décision de la division d’annulation et que le rappelle l’EUIPO, plusieurs documents présentés par l’intervenante et figurant au dossier de la procédure devant l’EUIPO révèlent au contraire que, à cette période, le terme « smart » était déjà utilisé pour les produits dotés de caractéristiques technologiques. La référence opérée par la division d’annulation à la décision de l’EUIPO du 23 mai 2003 (002688695) – refusant l’enregistrement du signe SmartCam – et à la décision de la première chambre de recours du 24 février 2005 (R 798/2004-1) – confirmant également le caractère purement descriptif du signe SmartNet – renforce plutôt la considération selon laquelle il est inexact de considérer que le public pertinent n’attribuait la qualité de « smart » qu’aux êtres humains.

25      Deuxièmement, la chambre de recours a souligné à juste titre que l’élément verbal « smart » pouvait également être compris dans le sens de « à la mode, chic », ce que ne conteste d’ailleurs pas la requérante. À cet égard et comme l’a indiqué ladite chambre au point 39 de la décision attaquée, cette dernière signification dudit élément verbal est pertinente pour les produits relevant de la classe 20, qui ne présentent aucune fonctionnalité ou caractéristique technologique. Il ressort ainsi des appréciations de la chambre de recours que le fait que les produits relevant de ladite classe ne présentant pas de caractéristique technologique, tels que, par exemple, des objets en liège, en ivoire, en ambre ou en écume de mer, puissent être des « objets chics, élégants » peut être considéré comme une caractéristique commune pertinente aux fins du caractère descriptif, ce qui permet de regrouper ces produits dans un seul groupe d’une homogénéité suffisante [voir, en ce sens, arrêts du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, points 35 et 36, et du 13 mai 2020, Koenig & Bauer/EUIPO (we’re on it), T‑156/19, non publié, EU:T:2020:200, point 68].

26      Il s’ensuit que, en considérant que l’élément verbal « smart » était descriptif de l’ensemble des produits et des services visés par la marque contestée, la chambre de recours n’a commis aucune erreur d’appréciation.

27      En second lieu, en ce qui concerne l’élément verbal « things », la chambre de recours a indiqué au point 24 de la décision attaquée qu’il désignait tout objet ou concept, qu’il fût tangible ou intangible et qu’il ne se limitait donc pas à des objets physiques. Elle a considéré, au point 40 de ladite décision, que tous les produits relevant des classes 9 et 20 visés par la marque contestée étaient des objets physiques. Elle a également estimé au point 43 de cette décision attaquée que cet élément verbal visait les services concernés relevant de la classe 35 soit en tant que référence aux produits auxquels les services se rapportaient (comme une publicité réalisée pour ces produits), soit en tant que référence à la manière intelligente dont les services étaient fournis.

28      Ces considérations de la chambre de recours, que la requérante n’a au demeurant pas remis en cause dans la partie de la requête consacrée aux « moyens juridiques », sont exemptes d’erreur.

29      Il convient d’ajouter que la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 26 de la décision attaquée, que la combinaison des termes « smart » et « things » respectait les règles de grammaire de la langue anglaise. De plus, l’association de ces termes ne représentait rien de plus que la description ou la caractérisation des choses par l’adjectif « intelligent » ou « élégant ». Il y a ainsi lieu de considérer qu’une telle combinaison ne possédait pas un caractère inhabituel suffisamment prononcé pour créer une signification nouvelle et clairement distincte. Ainsi, comme il a été rappelé au point 16 ci-dessus, il ne saurait être considéré que cette combinaison d’éléments descriptifs au sein de la marque contestée permettait de former une marque distinctive.

 Sur les éléments figuratifs de la marque contestée

30      Pour réfuter le caractère descriptif de la marque contestée, la requérante soutient que l’élément figuratif que constitue l’émoticône ne saurait lui-même être considéré comme descriptif. À cet égard, elle fait valoir, d’une part, que ledit élément figuratif traduit une émotion positive, laquelle est exclusivement associée aux humains et ne saurait donc pas être attribuée, tout du moins à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, aux produits et aux services concernés. Elle estime qu’il n’existe donc pas de lien direct entre cet élément figuratif et lesdits produits et services et que ce même élément figuratif ne peut ainsi pas être considéré comme une caractéristique au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001. D’autre part, elle estime que l’émoticône ne saurait être interprétée comme laudative, dès lors que le sourire d’un humain que représente pareil élément figuratif ne présente aucun rapport avec les produits et les services visés par ladite marque.

31      À titre liminaire, la chambre de recours a estimé, au point 32 de la décision attaquée que la police de caractère utilisée pour la lettre « T » dans les deux éléments verbaux diffère légèrement des polices de caractère les plus courantes, mais que cet élément demeure dépourvu de caractère distinctif. Cette considération, au demeurant non contestée par la requérante, n’est pas erronée étant donné que le consommateur moyen ne se livrera pas à un examen des différents détails de la marque et n’analysera donc pas les détails typographiques de la marque contestée.

32      En ce qui concerne l’élément figuratif « :) », il doit au préalable être relevé que, contrairement à ce que semble comprendre la requérante, la chambre de recours n’a pas considéré que l’émoticône était descriptive, mais elle a plutôt estimé qu’elle était dépourvue de caractère distinctif et que, en substance, elle ne détournait pas l’attention de la signification descriptive des éléments verbaux.

33      Premièrement, quant à l’affirmation de la requérante selon laquelle l’émoticône traduisait une émotion positive qui était exclusivement associée aux humains, elle n’est pas fondée. En effet, comme le souligne la chambre de recours aux points 28 à 31 de la décision attaquée, il est notoire que l’émoticône composée des caractères « : » et de « ) » représente un sourire et que son utilisation est généralisée dans les courriers et les autres types de messages électroniques ainsi que dans la publicité. C’est également à juste titre que ladite chambre a considéré que cet élément figuratif ne se limitait pas à traduire une émotion abstraite, mais soulignait la signification de l’élément verbal « smart » et renforçait ainsi le message selon lequel les produits concernés présentaient des caractéristiques positives.

34      Pour autant qu’il faille considérer que la requérante soutient que le public pertinent ne pouvait établir, à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, un rapport direct entre l’émotion traduite par l’émoticône et une matière non vivante, un tel argument ne saurait prospérer. En effet, la chambre de recours a estimé à juste titre pouvoir se fonder sur le caractère notoire de la signification de l’élément figuratif en tant que smiley et de son utilisation étendue dans le cadre des messages électroniques et de la publicité ainsi que sur le fait que ces smileys ne sont pas un phénomène récent.

35      Deuxièmement, quant à l’argument de la requérante tiré de ce que l’émoticône ne présente aucun caractère laudatif, il repose sur le fondement que l’émoticône traduit une émotion positive qui est exclusivement associée aux humains et non aux objets. Or, pour les raisons déjà exposées au point 34 ci-dessus, cet argument ne saurait prospérer. C’est donc sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré, au point 31 de la décision attaquée, que, en substance, l’émoticône appuyait l’idée que ce qui est « smart » est positif et renforce ainsi le message que les produits concernés disposent de caractéristiques positives, en l’occurrence celles d’être dotés d’une technologie intelligente.

36      Troisièmement, la requérante invoque en vain un argument reposant sur la considération que la marque contestée ne saurait être considérée comme descriptive au motif que, contrairement à ce qu’exige la jurisprudence, elle n’est pas uniquement composée d’éléments descriptifs.

37      Certes, comme il a été rappelé au point 32 ci-dessus, l’émoticône n’a pas été considéré par la chambre de recours comme un élément descriptif de la marque contestée. Il faut donc admettre que la marque contestée n’est pas uniquement composée d’éléments descriptifs. Toutefois, selon la jurisprudence, si l’élément verbal d’une marque est descriptif, la marque est, dans son ensemble, descriptive si les éléments figuratifs de cette marque ne permettent pas de détourner le public pertinent du message descriptif transmis par les éléments verbaux [arrêts du 6 avril 2017, Metabolic Balance Holding/EUIPO (Metabolic Balance), T‑594/15, non publié, EU:T:2017:261, point 33, et du 15 mars 2018, SSP Europe/EUIPO (SECURE DATA SPACE), T‑205/17, non publié, EU:T:2018:150, point 31]. Or, il ressort des points 32 à 34 ci-dessus que l’émoticône non descriptive de la marque contestée est dépourvue de caractère distinctif et ne saurait donc de ce fait détourner l’attention du public pertinent du message descriptif transmis par les éléments verbaux « smart » et « things ».

38      Quatrièmement et au surplus, la chambre de recours a souligné à juste titre et sans que cela ne soit contesté par la requérante que la couleur verte de l’émoticône ne faisait que la rendre visible dans le signe séparément des mots situés avant et après, et empêchait toute interprétation du signe en tant que « smart : », et que cette couleur ne lui conférait pas de caractère distinctif particulier (point 32 de la décision attaquée).

39      La chambre de recours a donc fait une application correcte de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 en concluant que, prise dans son ensemble, la marque contestée était descriptive.

40      Ainsi, conformément à ce qui a été rappelé au point 15 ci-dessus, il convient de considérer que la marque contestée présentait avec les produits et les services qu’elle désignait un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public de percevoir immédiatement, et sans une autre réflexion, une description de ces produits et de ces services ou l’une de leurs caractéristiques.

41      À cet égard, sont dépourvues d’erreur les conclusions de la chambre de recours selon lesquelles les considérations relatives au caractère descriptif de la marque contestée valent tant pour le grand public (dont le degré d’attention est moyen) que pour le public spécialisé dans le domaine des technologies de l’information (dont le degré d’attention est plus élevé). La requérante n’a au demeurant présenté aucun argument visant à dénoncer une éventuelle erreur de ladite chambre quant à l’incidence du degré d’attention du consommateur selon qu’il relève du grand public ou du public spécialisé.

42      Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré, en substance, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

43      Dans le cadre du deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, la requérante soutient que la chambre de recours a erronément jugé que la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif. Elle estime en effet que ladite marque satisfait aux exigences d’un caractère distinctif minimal et que, n’étant pas descriptive, celle-ci est apte à servir d’indication de l’origine des produits et des services pour lesquels elle a été enregistrée.

44      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

45      Selon une jurisprudence constante, il ressort clairement du libellé de l’article 7, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, qu’il suffit que l’un des motifs absolus de refus énumérés à cette disposition s’applique pour que le signe en cause ne puisse pas être enregistré comme marque de l’Union [arrêts du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, EU:C:2002:506, point 29 ; du 21 novembre 2013, Heede/OHMI (Matrix-Energetics), T‑313/11, non publié, EU:T:2013:603, point 68, et du 27 avril 2017, BASF/EUIPO – Evonik Industries (DINCH), T‑721/15, non publié, EU:T:2017:286, point 52].

46      Ainsi qu’il découle de la conclusion formulée au point 39 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur de droit en estimant que le motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 était applicable en l’espèce et que la marque contestée ne pouvait ainsi être enregistrée en tant que marque de l’Union, se heurtant à la cause de nullité prévue à la disposition précitée, lue en combinaison avec l’article 59, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001. Partant, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur le bien-fondé du présent moyen par lequel la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir méconnu le caractère distinctif de cette marque.

47      En tout état de cause, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, chacun des motifs absolus de refus d’enregistrement d’une marque énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001 est indépendant des autres et exige un examen séparé. Il n’en demeure pas moins qu’il existe un certain chevauchement des champs d’application respectifs de ces motifs [voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2008, Eurohypo/OHMI, C‑304/06 P, EU:C:2008:261, point 54, et du 23 janvier 2018, Wenger/EUIPO – Swissgear (SWISSGEAR), T‑869/16, non publié, EU:T:2018:23, point 74].

48      Le chevauchement des motifs absolus de refus implique, en particulier, qu’une marque verbale descriptive des caractéristiques de produits ou de services est, de ce fait, susceptible d’être dépourvue de caractère distinctif à l’égard de ces mêmes produits ou services, sans préjudice d’autres raisons pouvant justifier cette absence de caractère distinctif (ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI, C‑282/09 P, EU:C:2010:153, point 52, et arrêt du 23 janvier 2018, SWISSGEAR, T‑869/16, non publié, EU:T:2018:23, point 75).

49      En l’espèce, il a déjà été constaté que la chambre de recours a décidé à bon droit, dans la décision attaquée, que la marque contestée était descriptive des produits et des services pour lesquels elle était enregistrée (voir point 39 ci-dessus). Partant, c’est également à bon droit qu’elle a conclu que, du fait de ce caractère descriptif, la marque contestée ne permettrait pas au consommateur de déterminer l’origine du produit et que celle-ci était ainsi dépourvue de tout caractère distinctif.

50      De surcroît, la chambre de recours a procédé à une analyse du caractère distinctif de la marque contestée indépendamment du caractère descriptif de celle-ci et en a conclu que ce signe ne contenait aucun élément qui, au-delà du sens manifestement élogieux, assurant la promotion des produits et services, aurait permis au public pertinent de mémoriser facilement et immédiatement le signe en tant que marque distinctive pour les produits et services visés par la marque contestée. Or, la requérante n’a présenté aucun argument visant à remettre en cause cette analyse.

51      Eu égard à ce qui précède, le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de bonne administration

52      La requérante soulève un troisième moyen, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de bonne administration. Elle soutient que la chambre de recours a omis de prendre en compte les nombreuses marques de l’Union qu’elle avait citées et qui étaient similaires ou quasiment identiques à la marque contestée. Elle se réfère en particulier à une marque de l’Union dont l’intervenante est titulaire et à une marque dont l’intervenante a demandé l’enregistrement auprès de l’EUIPO, lesquelles sont composées d’éléments verbaux identiques et d’un élément graphique bien moins complexe que l’émoticône figurant dans la marque contestée, à savoir un simple cercle, et dont elle fait valoir que lesdites marques sont enregistrées pour les mêmes produits. Elle soutient que ladite chambre a omis d’expliquer pourquoi la marque contestée devait être annulée.

53      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments avancés par la requérante.

54      Si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’EUIPO doit prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité, de telle sorte qu’il ne saurait y avoir d’égalité dans l’illégalité et que la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en sa faveur ou au bénéfice d’autrui afin d’obtenir une décision identique. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet, afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue, et un tel examen doit ainsi avoir lieu dans chaque cas concret, car l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce et destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus [voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 73 à 77, et du 29 mars 2019, All Star/EUIPO – Carrefour Hypermarchés (Forme d’une semelle de chaussure), T‑611/17, non publié, EU:T:2019:210, point 125].

55      Or, en l’espèce, il ressort de l’examen qui précède que la chambre de recours a, à juste titre, constaté, sur la base d’un examen complet et en tenant compte de la perception du public pertinent, que la marque contestée se heurtait aux motifs absolus de refus énoncés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement 2017/1001 de sorte que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’EUIPO.

56      En tout état de cause, la chambre de recours a relevé à juste titre, au point 34 de la décision attaquée, que, s’agissant de la marque de l’Union européenne contenant les éléments verbaux « smart » et « things » dont l’intervenante est titulaire, celle-ci ne saurait être considérée comme constituant une reconnaissance du caractère distinctif de la marque contestée.

57      De plus, le fait que la marque de l’Union antérieure dont l’intervenante est titulaire ait été enregistrée ne préjuge en rien du fait que celle-ci puisse, elle aussi, se heurter au motif absolu de refus de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001 et soit ainsi susceptible, le cas échéant, de faire l’objet d’une annulation dans le cadre d’une procédure de nullité.

58      De surcroît, il importe de tenir compte du fait que la marque de l’Union antérieure dont l’intervenante est titulaire n’a été analysée que par l’examinateur et qu’il n’y a donc pas eu de décision comportant des motifs permettant d’expliquer pourquoi cette marque était autorisée à l’enregistrement. Ainsi, à supposer qu’il faille considérer que la marque contestée et la marque dont l’intervenante est la titulaire soient très similaires, il ne saurait être reproché à la chambre de recours d’avoir adopté une approche s’écartant de celle adoptée par l’examinateur sans justifier de façon explicite la raison pour laquelle elle s’en écartait. Il s’ensuit que la chambre de recours n’a pas violé les principes d’égalité de traitement et de bonne administration. Il ne saurait a fortiori pas être reproché à la chambre de recours de ne pas avoir motivé les raisons de la nullité de la marque contestée en perspective avec la marque de l’Union dont l’intervenante est titulaire.

59      Compte tenu de ce qui précède, il doit être considéré que la chambre de recours n’a commis aucune violation des principes d’égalité de traitement et de bonne administration si bien que le troisième moyen doit être rejeté.

 Sur le quatrième moyen tiré, en substance, de la violation de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

60      La requérante estime que la chambre de recours a violé le principe selon lequel la charge de la preuve incombe au demandeur en nullité. Elle constate que ladite chambre s’est fondée sur des faits prétendument notoires pour conclure que, en 2012, le public pertinent percevait d’une certaine manière la marque contestée, et ajoute que l’intervenante n’a produit, de son côté, aucune preuve de la perception par ledit public des termes composant la marque contestée à cette période-là. De plus, elle se prévaut d’un exemple issu de la jurisprudence selon laquelle il convient d’attribuer une valeur réduite à une enquête réalisée en 2007 pour déterminer le caractère distinctif d’une marque dont la demande a été déposée en 2005, l’opinion de ce public étant susceptible de changer de manière significative sur une période de deux ans. Elle en déduit qu’une enquête professionnelle concernant la perspective du même public ne saurait être considérée comme suffisante à défaut de concerner la période pertinente. Elle se pose en outre la question de savoir comment ladite chambre a pu conclure que les faits concernés étaient si évidents qu’ils pouvaient être qualifiés de notoires.

61      L’EUIPO et l’intervenante réfutent ces arguments.

 Sur le règlement applicable

62      L’EUIPO et l’intervenante ne sont pas d’accord quant à la disposition applicable en l’espèce. Le premier soutient qu’il s’agit de l’article 95 du règlement 2017/1001. La seconde estime que l’article 76 du règlement no 207/2009 est le seul à pouvoir trouver application.

63      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur [arrêts du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45, et du 6 juin 2019, Torrefazione Caffè Michele Battista/EUIPO – Battista Nino Caffè (BATTISTINO), T‑221/18, non publié, EU:T:2019:382, point 19].

64      L’article 95 du règlement 2017/1001 porte sur l’« examen d’office des faits » et prévoit que, « [d]ans les procédures de nullité engagées en vertu de l’article 59, l’[EUIPO] limite son examen aux moyens et arguments soumis par les parties ». S’agissant d’une disposition de procédure, elle devait donc trouver application à la date d’entrée en vigueur dudit règlement. L’article 212 du règlement 2017/1001 a indiqué que le règlement s’appliquait à compter du 1er octobre 2017. La procédure devant la chambre de recours a été entamée à la date à laquelle l’intervenante a formé un recours contre la décision de la division d’annulation, c’est-à-dire le 7 mai 2018.

65      Il s’ensuit que l’article 95 du règlement 2017/1001 invoqué au fondement du quatrième moyen est la disposition applicable au cas d’espèce.

 Sur la violation alléguée de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001

66      L’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 prévoit que, « [a]u cours de la procédure, l’[EUIPO] procède à l’examen d’office des faits ; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Dans les procédures de nullité engagées en vertu de l’article 59 [dudit règlement], l’[EUIPO] limite son examen aux moyens et arguments soumis par les parties ».

67      Conformément à l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, lors de l’examen des motifs absolus de refus, les examinateurs de l’EUIPO et, sur recours, les chambres de recours de l’EUIPO doivent procéder à l’examen d’office des faits afin de déterminer si la marque dont l’enregistrement est demandé relève ou non d’un des motifs de refus d’enregistrement énoncés à l’article 7 du même règlement. Il s’ensuit que les organes compétents de l’EUIPO peuvent être amenés à fonder leurs décisions sur des faits qui n’auraient pas été invoqués par le demandeur [voir, en ce sens, arrêts du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑25/05 P, EU:C:2006:422, point 50, et du 21 avril 2015, Louis Vuitton Malletier/OHMI – Nanu-Nana (Représentation d’un motif à damier gris), T‑360/12, non publié, EU:T:2015:214, point 59].

68      Toutefois, ainsi que le législateur l’a expressément prévu à la dernière phrase de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, dans le cadre d’une procédure de nullité, l’EUIPO limite son examen aux moyens et arguments soumis par les parties.

69      Il n’en demeure pas moins que l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 ne fait pas obstacle à ce que les instances de l’EUIPO fondent leur décisions, outre sur les faits et les preuves présentés par les parties, sur des faits notoires, c’est-à-dire des faits qui sont susceptibles d’être connus par toute personne ou qui peuvent être connus par des sources généralement accessibles [voir, par analogie, arrêts du 22 juin 2004, Ruiz-Picasso e.a./OHMI – DaimlerChrysler (PICARO), T‑185/02, EU:T:2004:189, point 29 ; du 15 janvier 2013, Welte-Wenu/OHMI – Commission (EUROPEAN DRIVESHAFT SERVICES), T‑413/11, non publié, EU:T:2013:12, point 24, et ordonnance du 23 novembre 2015, Actega Terra/OHMI – Heidelberger Druckmaschinen (FoodSafe), T‑766/14, non publiée, EU:T:2015:913, point 34].

70      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si la chambre de recours s’est appuyée sur des faits notoires et, le cas échéant, sur quels faits notoires, pour fonder la décision attaquée.

71      Au préalable, il y a lieu de relever que le reproche fait par la requérante à la chambre de recours d’avoir fondé la décision attaquée sur des faits notoires ne concerne que les éléments verbaux et non l’élément figuratif de la marque contestée.

72      Il ressort en substance des points 19 à 26 de la décision attaquée que la chambre de recours a déterminé la signification des éléments verbaux « smart » et « things » de la marque contestée à la fois sur le fondement de faits notoires, en mentionnant plusieurs décisions des instances de l’EUIPO refusant l’enregistrement de marques comprenant le terme « smart » et en se référant indirectement aux constats opérés par la division d’annulation s’appuyant sur plusieurs documents.

73      Premièrement, il est notoire que, avant l’année 2012, à savoir celle du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, les « objets intelligents » tels que les smartphones étaient déjà fréquemment utilisés. Comme le soutient l’EUIPO, le smartphone lancé par la société Apple date de l’année 2007. D’autre part, au point 19 de la décision attaquée, la chambre de recours n’a fait que confirmer le constat fait par la division d’annulation selon lequel le terme « smart » se comprenait comme une « imitation de l’intelligence humaine à l’aide de procédé informatique ». Or, pour arriver à un tel constat, la division d’annulation s’était fondée à la fois sur les définitions du dictionnaire, sur un ensemble de publications ainsi que sur des décisions de l’EUIPO antérieures au dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée. À cet égard, il importe de relever que, au point 34 de ladite décision, cette chambre a souligné que les références faites par la requérante « à la date de dépôt comme date de référence » ne jouaient pas en sa faveur, que les définitions du dictionnaire étaient les mêmes depuis la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée et que la signification des termes concernés n’avait jamais changé et avait toujours été comprise par le public depuis le début.

74      Deuxièmement, le constat que l’élément verbal « smart » serait également compris dans le sens d’un objet « chic et tendance » trouve son fondement dans la définition issue d’un extrait du dictionnaire en ligne Collins antérieur à la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée, présentée par l’intervenante lors de la procédure devant la division d’annulation, auquel la chambre de recours fait indirectement référence au point 34 de la décision attaquée.

75      À ce stade, il y a lieu de relever, d’une part, qu’un extrait dictionnaire en ligne constituait en 2012 une source généralement accessible au grand public. Au regard de la jurisprudence citée au point 69 ci-dessus, il doit être considéré que les significations du terme « smart » figurant dans ce dictionnaire pouvaient être connues par des sources généralement accessibles et constituaient donc un fait notoire. D’autre part, la requérante n’a présenté aucun argument visant à remettre en cause les constatations fondées sur les documents de l’intervenante et les décisions de l’EUIPO, quant à la signification des éléments verbaux « smart » et « things ».

76      Il s’ensuit que la chambre de recours n’a commis aucune violation de l’article 95 du règlement 2017/1001 lorsqu’elle a déterminé la perception que le public pertinent avait des éléments verbaux « smart » et « things ».

77      Partant, il convient de rejeter le quatrième moyen.

78      Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

79      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens concernant la présente procédure, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      smart things solutions GmbH est condamnée à ses propres dépens ainsi qu’à ceux exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et par Samsung Electronics GmbH.

Tomljenović

Škvařilová-Pelzl

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 octobre 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.