ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR

11 mars 2022 (*)

« Pourvoi – Intervention – Intérêt à la solution du litige – Rejet »

Dans l’affaire C‑499/21 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 13 août 2021,

Joshua David Silver, demeurant à Bicester (Royaume-Uni),

Leona Catherine Bashow, demeurant à Cheadle (Royaume-Uni),

Charles Nicholas Hilary Marquand, demeurant à Londres (Royaume-Uni),

JY,

JZ,

Anthony Styles Clayton, demeurant à Sevenoaks (Royaume-Uni),

Gillian Margaret Clayton, demeurant à Sevenoaks,

représentés par Me P. Tridimas, dikigoros, ainsi que par M. D. Harrison et Mme A. von Westernhagen, solicitors,

parties requérantes,

l’autre partie à la procédure étant :

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Bauer et R. Meyer ainsi que par Mme J. Ciantar, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LE PRÉSIDENT DE LA COUR,

vu la proposition de M. N. Jääskinen, juge rapporteur,

l’avocat général, M. N. Emiliou, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par leur pourvoi, M. Joshua David Silver, Mme Leona Catherine Bashow, M. Charles Nicholas Hilary Marquand, JY, JZ, M. Anthony Styles Clayton et Mme Gillian Margaret Clayton demandent l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 8 juin 2021, Silver e.a./Conseil (T‑252/20, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2021:347), par laquelle ce dernier a rejeté comme étant irrecevable leur recours tendant à l’annulation partielle de la décision (UE) 2020/135 du Conseil, du 30 janvier 2020, relative à la conclusion de l’accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 2020, L 29, p. 1, ci-après la « décision litigieuse »).

2        Par acte déposé au greffe de la Cour le 16 janvier 2022, l’European Citizens’ Rights, Involvement and Trust (ECIT), fondation d’utilité publique de droit belge, a demandé à être admise à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions des requérants.

3        Par acte déposé au greffe de la Cour le 2 février 2022, le Conseil de l’Union européenne a conclu au rejet de cette demande en intervention, au motif, notamment, que l’ECIT ne saurait se prévaloir d’un intérêt direct et actuel à la solution du litige. Il fait valoir, en particulier, que l’ECIT est une organisation qui promeut la citoyenneté de l’Union en général, sans avoir spécifiquement pour objet la situation des ressortissants du Royaume-Uni après la décision de cet État de se retirer de l’Union européenne. Selon lui, le fait que l’ECIT a pour objectif de favoriser la citoyenneté de l’Union en général ne suffit pas, à lui seul, à démontrer en quoi sa situation juridique, ou celle de ses membres, serait affectée par la décision à intervenir, au sens d’une jurisprudence constante de la Cour.

4        En revanche, par acte déposé au greffe de la Cour le 7 février 2022, les requérants ont conclu que l’ECIT a un intérêt à la solution du litige, dès lors que la mission de celle-ci consistant à promouvoir la citoyenneté de l’Union présente un lien suffisamment direct avec l’objet du litige et que ce dernier soulève des questions de principe susceptibles d’affecter les intérêts défendus par cette fondation.

 Sur la demande en intervention

5        Aux termes de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, toute personne justifiant d’un intérêt à la solution d’un litige soumis à la Cour, autre qu’un litige entre les États membres, entre les institutions de l’Union ou entre ces États et ces institutions, est en droit d’intervenir à ce litige.

6        Selon une jurisprudence constante de la Cour, la notion d’« intérêt à la solution du litige », au sens de cette disposition, doit se définir au regard de l’objet même du litige et s’entendre comme étant un intérêt direct et actuel porté au sort réservé aux conclusions elles-mêmes, et non comme étant un intérêt à l’égard des moyens soulevés ou des arguments invoqués. En effet, les termes « solution du litige » renvoient à la décision finale demandée, telle qu’elle serait consacrée dans le dispositif de l’arrêt ou de l’ordonnance à intervenir (voir, notamment, ordonnances du président de la Cour du 5 juillet 2018, Uniwersytet Wrocławski et Pologne/REA, C‑515/17 P et C‑561/17 P, non publiée, EU:C:2018:553, point 7, ainsi que du 18 janvier 2019, Polskie Górnictwo Naftowe i Gazownictwo/Commission, C‑342/18 P, non publiée, EU:C:2019:42, point 5 et jurisprudence citée).

7        À cet égard, il convient notamment de vérifier si le demandeur en intervention est affecté directement par l’acte attaqué et si son intérêt à la solution du litige est certain. En principe, un intérêt à la solution du litige ne saurait être considéré comme suffisamment direct que dans la mesure où cette solution est de nature à modifier la situation juridique du demandeur en intervention (voir, notamment, ordonnance du président de la Cour du 18 janvier 2019, Polskie Górnictwo Naftowe i Gazownictwo/Commission, C‑342/18 P, non publiée, EU:C:2019:42, point 6 et jurisprudence citée).

8        En l’espèce, le pourvoi tend à l’annulation de l’ordonnance attaquée, par laquelle le Tribunal a rejeté comme étant irrecevable, pour défaut de qualité à agir, le recours fondé sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision litigieuse, introduit par les requérants.

9        Par la décision litigieuse, le Conseil a approuvé, au nom de l’Union et de la Communauté européenne de l’énergie atomique, la conclusion de l’accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 2020, L 29, p. 7), lequel est joint à celle-ci.

10      Le 31 janvier 2020, le Royaume-Uni s’est retiré de l’Union et de la Communauté européenne de l’énergie atomique. Le 1er février suivant, l’accord de retrait susmentionné est entré en vigueur.

11      À l’appui de sa demande en intervention, l’ECIT fait valoir, se référant à sa demande en intervention présentée devant le Tribunal dans le cadre de l’affaire T‑252/20, sur laquelle ce dernier ne s’est pas prononcé compte tenu de l’irrecevabilité du recours principal dans cette affaire, qu’elle a pour mission de promouvoir une « citoyenneté européenne plus inclusive » fondée non seulement sur la nationalité d’un État membre, mais aussi sur le lieu de résidence, et s’étendant au-delà des frontières de l’Union.

12      En particulier, l’ECIT fait observer que, au cours des cinq dernières années, la question de la perte de la citoyenneté de l’Union des ressortissants du Royaume-Uni a été prépondérante dans toutes les activités de la fondation. À cet égard, l’ECIT affirme que de nombreuses pétitions, dans le cadre desquelles le maintien de la citoyenneté de l’Union était réclamé, ont été déposées au Parlement européen par des personnes impliquées auprès de l’ECIT, notamment lorsque ces personnes n’étaient pas titulaires d’un droit de vote lors du référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union qui a eu lieu le 23 juin 2016.

13      À cet égard, il y a lieu de relever que l’ECIT fonde son intérêt non pas au regard de la solution du litige dont la Cour est saisie dans le cadre de la présente affaire, à savoir celle ayant pour objet le pourvoi portant sur la recevabilité du recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse, mais au regard de la solution du litige dont le Tribunal viendrait à être saisi si la Cour décidait d’annuler l’ordonnance attaquée (voir, par analogie, ordonnances du président de la Cour du 27 février 2015, Mory e.a./Commission, C‑33/14 P, non publiée, EU:C:2015:135, point 11, ainsi que du 18 janvier 2019, Polskie Górnictwo Naftowe i Gazownictwo/Commission, C‑342/18 P, non publiée, EU:C:2019:42, point 11).

14      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’ECIT n’a pas démontré avoir un intérêt à la solution du litige, au sens de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et que, dès lors, la demande en intervention présentée par celle-ci doit être rejetée.

 Sur les dépens

15      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’ECIT ayant succombé en sa demande en intervention et ni les requérants ni le Conseil n’ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de décider que l’ECIT, les requérants et le Conseil supporteront leurs propres dépens afférents à la demande en intervention.

Par ces motifs, le président de la Cour ordonne :

1)      La demande en intervention présentée par l’European Citizens’ Rights, Involvement and Trust (ECIT) est rejetée.

2)      L’European Citizens’ Rights, Involvement and Trust (ECIT) M. Joshua David Silver, Mme Leona Catherine Bashow, M. Charles Nicholas Hilary Marquand, JY, JZ, M. Anthony Styles Clayton et Mme Gillian Margaret Clayton ainsi que le Conseil de l’Union européenne supportent leurs propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.