Recours introduit le 6 décembre 2024 – Green Impact e.a./Conseil et Commission
(Affaire T-634/24)
Langue de procédure : l’italien
Parties
Parties requérantes : Green Impact ETS (Rome, Italie), Earth ODV (Rome), Nagy Tavak és Vizes Élőhelyek Szövetsége (Alsóörs, Hongrie), LNDC Animal Protection APS (Milan, Italie), One Voice (Strasbourg, France) (représentant : L. D’Agostino, avvocato)
Parties défenderesses : Conseil de l’Union européenne, Commission européenne
Conclusions
Les parties requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
annuler la décision (UE) 2024/2669 du Conseil, du 26 septembre 2024, relative à la soumission, au nom de l’Union européenne, d’une proposition d’amendement des annexes II et III de la convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe et à la position à prendre, au nom de l’Union, lors de la 44e réunion du comité permanent de ladite convention ; il est demandé d’annuler cette proposition et le vote exprimé lors de la 44e réunion du comité permanent de la convention de Berne le 3 décembre 2024, ainsi que tout acte ultérieur connexe et lié à la décision (UE) 2024/2669, même si les requérantes n’en ont pas encore connaissance ;
condamner les institutions défenderesses aux dépens.
Moyens et principaux arguments
À l’appui du recours, les parties requérantes invoquent deux moyens.
Premier moyen tiré de la violation des traités et en particulier de l’article 191, paragraphe 3, TFUE, de l’article 6, paragraphe 1, TUE, lu en combinaison avec l’article 37 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, en ce que le Conseil a approuvé la décision attaquée sans tenir dûment compte des données scientifiques et techniques disponibles.
À cet égard, lors de la phase préparatoire de la décision attaquée, le Conseil a ignoré ou a sous-évalué une série de rapports scientifiques de portée internationale, parmi lesquels les rapports établis par la Large Carnivore Initiative for Europe ainsi que par d’autres organisations académiques de renom, qui montrent que la population des loups en Europe n’est pas encore à l’abri de risques importants.
Le Conseil a décidé de proposer à la convention de Berne d’abaisser le statut de protection (downlisting) du loup gris, en rappelant les mêmes données scientifiques qui, en 2022, avaient conduit l’Union européenne à voter contre une proposition analogue présentée par la Suisse.
Lors de l’élaboration et de la présentation de la proposition, les principes fondamentaux de transparence et d’objectivité requis par le droit de l’Union n’ont pas été respectés, comme en atteste l’ouverture d’une enquête par la Médiatrice européenne (affaire 1758/2024/FE).
En définitive, le déclassement du loup approuvé par le Conseil est fondé sur une lecture erronée de l’état de conservation de l’espèce et ignore les risques, scientifiquement démontrés, pour la biodiversité et les écosystèmes.
Deuxième moyen tiré de la violation des principes de proportionnalité et de précaution, d’un excès ou d’un détournement de pouvoir, d’un défaut d’instruction en lien avec le non-respect du principe du « recours aux meilleures données scientifiques disponibles », ainsi que de la violation des principes énoncés par la Cour de justice concernant les dérogations au régime de protection du loup commun.
À cet égard, les parties requérantes rappellent quelques arrêts de principe rendus par la Cour de justice concernant le régime de dérogations de la directive Habitat 1 afin de démontrer qu’il est absolument nécessaire d’assurer un « état de conservation favorable, de la population de l’espèce concernée dans son aire de répartition naturelle » et que les choix de protection doivent suivre une « approche préventive, visant à garantir la protection effective des populations des espèces concernées ».
La décision attaquée va également à l’encontre des lignes directrices issues de la recommandation no 56 (1997) adoptée par le Comité permanent de la convention de Berne. Cette recommandation indique que les amendements aux annexes I et II de cette convention doivent être apportés de manière cohérente et être fondés sur les meilleures connaissances scientifiques disponibles.
Dès sa présentation, la proposition du Conseil était basée sur un compromis politique visant à assurer un équilibre entre la protection du loup et les demandes des communautés rurales. Toutefois, une telle approche, si elle se justifie dans des contextes politiques plus larges, est totalement inappropriée pour une décision qui concerne la protection de la biodiversité et qui doit nécessairement être fondée sur les meilleures connaissances scientifiques disponibles et sur le principe de précaution.
Le Conseil n’a pas pris en considération d’autres mesures de moindre incidence et scientifiquement fondées en vue d’assurer la protection effective du loup gris.
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1 Directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO 1992, L 206, p. 7).