ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR

9 juillet 2025 (*)

« Pourvoi – Demande d’intervention – Intérêt à la solution du litige – Admission »

Dans l’affaire C‑48/25 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 24 janvier 2025,

Commission européenne, représentée par Mmes S. Delaude, I. Galindo Martín, B. Rous Demiri et F. van Schaik, en qualité d’agents,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Aboca SpA Soc. agr., établie à Sansepolcro (Italie),

Coswell SpA, établie à Funo di Argelato (Italie),

Associação portuguesa de suplementos alimentares (Apard), établie à Lisbonne (Portugal),

représentées par Me K. Ewert, Rechtsanwältin, M. D. Scannell, BL, Mme C. Thomas, BL, et M. B. Kelly, solicitor,


parties demanderesses en première instance,

soutenues par :

République italienne, représentée par M. S. Fiorentino, en qualité d’agent,

partie intervenante au pourvoi,

LE PRÉSIDENT DE LA COUR

vu la proposition de M. N. Fenger, juge rapporteur,

l’avocate générale, Mme T. Ćapeta, entendue,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 13 novembre 2024, Aboca e.a./Commission (T‑302/21, EU:T:2024:808), par lequel celui-ci a annulé l’article 1er, point 1, première à troisième mentions, et point 2, du règlement (UE) 2021/468 de la Commission, du 18 mars 2021, modifiant l’annexe III du règlement (CE) no 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les espèces végétales contenant des dérivés hydroxyanthracéniques (JO 2021, L 96, p. 6, ci‑après le « règlement litigieux »).

2        Par acte déposé au greffe de la Cour le 22 avril 2025, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a, en application de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et conformément à l’article 190 du règlement de procédure de la Cour, demandé à être admise à intervenir au présent pourvoi au soutien des conclusions de la Commission.

3        À la suite de la signification aux parties par le greffier de la Cour, conformément à l’article 131, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de celui-ci, de la demande d’intervention, aucune d’entre elles n’a déposé d’observations dans le délai requis.

4        À l’appui de sa demande d’intervention, l’EFSA affirme avoir un intérêt à la solution du litige soumis à la Cour au motif qu’elle a participé à la procédure d’adoption du règlement litigieux. Elle fait valoir qu’elle a émis, le 22 novembre 2017, sur demande de la Commission et en application de l’article 8, paragraphes 1 et 2, du règlement (CE) no 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, concernant l’adjonction de vitamines, de minéraux et de certaines autres substances aux denrées alimentaires (JO 2006, L 404, p. 26), ainsi que du règlement d’exécution (UE) no 307/2012 de la Commission, du 11 avril 2012, établissant des modalités d’exécution pour la mise en œuvre de l’article 8 du règlement (CE) no 1925/2006 du Parlement européen et du Conseil concernant l’adjonction de vitamines, de minéraux et de certaines autres substances aux denrées alimentaires (JO 2012, L 102, p. 2), un avis scientifique sur l’évaluation de la sécurité de l’utilisation des dérivés hydroxyanthracéniques dans les denrées alimentaires. Sur le fondement des conclusions de cet avis scientifique, la Commission a adopté le règlement litigieux.

5        À cet égard, l’EFSA fait en substance valoir que son intérêt à la solution du litige tient au fait que l’arrêt du 13 novembre 2024, Aboca e.a./Commission (T‑302/21, EU:T:2024:808), remet en cause, directement ou indirectement, la validité des conclusions auxquelles elle est parvenue dans son avis, ce qui aurait une incidence sur les méthodes d’évaluation des substances prévues par le règlement no 1925/2006, tout comme la pertinence de l’évaluation scientifique des risques opérée par l’EFSA ainsi que la fiabilité de cette évaluation. En outre, l’interprétation retenue par le Tribunal de l’avis scientifique en cause pourrait mettre en danger la santé publique.

 Sur la demande d’intervention

6        En vertu de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, les organes et les organismes de l’Union européenne, s’ils peuvent justifier d’un intérêt à la solution du litige soumis à la Cour, sont en droit d’intervenir à ce litige.

7        Selon une jurisprudence constante, la notion d’« intérêt à la solution d’un litige », au sens de cette disposition, doit se définir au regard de l’objet du litige et s’entendre comme étant un intérêt direct et actuel au sort réservé aux conclusions elles-mêmes, et non comme étant un intérêt par rapport aux moyens ou aux arguments soulevés. En effet, les termes « solution du litige » renvoient à la décision finale demandée, telle qu’elle serait consacrée dans le dispositif de l’arrêt à intervenir (ordonnances du président de la Cour du 27 février 2015, Mory e.a./Commission, C‑33/14 P, EU:C:2015:135, point 7, ainsi que du 4 février 2025, Medel e.a./Conseil, C‑555/24 P, EU:C:2025:73, point 6).

8        Or, il y a lieu de constater que les organes et les organismes de l’Union, à la différence des personnes physiques et morales, sont susceptibles de demander à intervenir à un litige soumis à la Cour non pas pour défendre des intérêts privés ou, comme pour les associations, des intérêts en lien avec leur objet social, tel que la défense de l’environnement, mais plutôt, lorsque comme en l’espèce l’acte à l’origine du litige a été adopté au terme d’une procédure dans laquelle l’organe ou l’organisme en question a été appelé à jouer un rôle, afin de défendre l’avis qu’il aurait émis ou les évaluations qu’il aurait effectuées dans le cadre de cette procédure (ordonnance du président de la Cour du 17 septembre 2021, Parlement/Commission, C‑144/21, EU:C:2021:757, point 11).

9        Dès lors, pour ce qui concerne les demandes d’intervention des organes et des organismes de l’Union, il y a lieu d’appliquer la condition tenant à l’existence d’un intérêt direct et actuel à la solution du litige d’une manière qui reflète cette spécificité (ordonnance du président de la Cour du 17 septembre 2021, Parlement/Commission, C‑144/21, EU:C:2021:757, point 12).

10      Ainsi, s’agissant des demandes d’intervention à un litige ayant pour objet l’annulation d’un acte de l’Union, voire d’une décision du Tribunal ayant annulé un tel acte, présentées par des organes et des organismes de l’Union, il y a lieu de considérer que l’exigence d’un intérêt direct et actuel à la solution d’un tel litige dans le chef de cet organe ou de cet organisme est remplie, notamment, si cet organe ou organisme est en mesure d’établir que l’acte de l’Union en cause a été adopté au terme d’une procédure dans laquelle, conformément au droit de l’Union, sa participation est prévue, le cas échéant par l’adoption d’avis ou la fourniture d’évaluations (ordonnance du président de la Cour du 17 septembre 2021, Parlement/Commission, C‑144/21, EU:C:2021:757, point 13).

11      Or, tel est bien le cas en l’occurrence. En effet, il est constant que c’est sur le fondement des conclusions de l’avis scientifique de l’EFSA visé au point 4 de la présente ordonnance que la Commission a adopté le règlement litigieux, par lequel elle a, d’une part, par l’article 1er, point 1, première, deuxième, et quatrième mentions, de celui-ci, inscrit l’aloe-émodine, l’émodine et la dantrone, ainsi que toutes les préparations dans lesquelles ces substances sont présentes, de même que, par cet article 1er, point 1, troisième mention, les préparations à partir de feuilles des espèces d’Aloe contenant des dérivés hydroxyanthracéniques (ci-après les « DHA »), à l’annexe III, partie A, du règlement no 1925/2006. D’autre part, elle a, par l’article 1er, point 2, première à troisième mentions, du règlement litigieux, inscrit les préparations à partir de racines ou de rhizomes de Rheum palmatum L, de Rheum officinale Baillon et de leurs hybrides contenant des DHA, les préparations à partir de feuilles ou de fruits de Cassia senna L contenant des DHA et les préparations à partir d’écorces de Rhamnus frangula L ou de Rhamnus purshiana DC contenant des DHA à l’annexe III, partie C, du règlement no 1925/2006.

12      Par conséquent, il y a lieu d’admettre, conformément à l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 131, paragraphe 3, du règlement de procédure, la demande d’intervention de l’EFSA au soutien des conclusions de la Commission.

 Sur les droits procéduraux de l’intervenante

13      La demande d’intervention étant admise, l’EFSA recevra communication, en application de l’article 131, paragraphe 3, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de ce règlement, de tous les actes de procédure signifiés aux parties en l’absence de demande de ces parties tendant à ce que certaines pièces ou certains documents soient exclus de cette communication.

14      Cette demande ayant été présentée dans le délai d’un mois prévu à l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, l’EFSA pourra, conformément à l’article 132, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 190, paragraphe 1, de celui-ci, présenter un mémoire en intervention dans un délai d’un mois suivant la communication visée au point précédent, augmenté du délai de distance forfaitaire de dix jours prévu à l’article 51 dudit règlement.

15      Enfin, l’EFSA pourra présenter des observations orales si une audience de plaidoiries est organisée.

 Sur les dépens

16      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance.

17      En l’espèce, la demande d’intervention de l’EFSA étant accueillie, il y a lieu de réserver les dépens liés à son intervention.

Par ces motifs, le président de la Cour ordonne :

1)      L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) est admise à intervenir dans l’affaire C48/25 P au soutien des conclusions de la Commission européenne.

2)      Une copie de tous les actes de procédure sera signifiée à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) par les soins du greffier.

3)      L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) dispose d’un délai d’un mois, augmenté du délai de distance forfaitaire de dix jours et prenant cours à la date de la signification visée au point 2 du présent dispositif, pour présenter un mémoire en intervention.

4)      Les dépens liés à l’intervention de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) sont réservés.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.