DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

4 septembre 2025 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑764/15 DEP,

Deutsche Lufthansa AG, établie à Cologne (Allemagne), représentée par Me A. Martin-Ehlers, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne,

partie défenderesse,

soutenue par

Land Rheinland-Pfalz (Allemagne), représenté par Mes R. van der Hout et V. Lemonnier, avocats,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. L. Truchot, président, H. Kanninen (rapporteur) et Mme T. Perišin, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu l’ordonnance du 17 mai 2019, Deutsche Lufthansa/Commission (T‑764/15, non publiée, EU:T:2019:349),

rend la présente

Ordonnance

1        Par sa demande, fondée sur l’article 170 du règlement de procédure du Tribunal, l’intervenant, le Land Rheinland-Pfalz, demande au Tribunal de fixer à la somme de 35 773,58 euros le montant des dépens récupérables devant être payés par la requérante, Deutsche Lufthansa AG, au titre des frais qu’il a exposés dans le cadre de la procédure dans l’affaire T‑764/15, y compris les frais exposés dans le cadre de la présente procédure.

I.      Antécédents de la contestation

2        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 décembre 2015 et enregistrée sous le numéro T‑764/15, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision (UE) 2016/788 de la Commission, du 1er octobre 2014, relative à l’aide d’État SA.32833 (11/C) (ex 11/NN) mise à exécution par l’Allemagne concernant les modalités de financement de l’aéroport de Francfort-Hahn mises en place de 2009 à 2011 (JO 2016, L 134, p. 1 ; ci-après la « décision attaquée »).

3        L’intervenant a été admis à intervenir au litige à l’appui des conclusions de la Commission européenne.

4        Par une ordonnance du 17 mai 2019, Deutsche Lufthansa/Commission (T‑764/15, non publiée, EU:T:2019:349), le Tribunal a rejeté le recours et a condamné la requérante à supporter, les dépens exposés par l’intervenant.

5        Par lettre du 24 mai 2019, le professeur Koenig, qui avait représenté l’intervenant dans la procédure principale, a contacté la requérante au sujet des dépens récupérables dans ladite affaire.

6        Par courriel du 7 juin 2019, la requérante a proposé le remboursement d’un montant de 11 900 euros.

7        Par un arrêt du 20 janvier 2022, Deutsche Lufthansa/Commission (C‑594/19 P, EU:C:2022:40), la Cour a rejeté le pourvoi introduit par la requérante contre l’ordonnance du Tribunal et condamné celle-ci à supporter les dépens afférents au pourvoi.

8        Par lettre du 4 février 2022, la requérante a invoqué la compensation des créances de dépens détenues par l’intervenant par des créances qu’elle prétendait avoir à l’encontre de l’intervenant.

9        Après d’autres échanges entre l’intervenant et la requérante au sujet du remboursement des dépens, par lettre du 12 août 2024, signifiée à la requérante le 17 août 2024, l’intervenant a demandé le remboursement de 28 265,42 euros. Dans cette lettre, l’intervenant a fixé un délai au 23 septembre 2024 pour le remboursement dudit montant, au-delà duquel l’intervenant saisirait le Tribunal d’une demande de taxation des dépens.

10      Par la suite, il y a eu d’autres échanges entre l’intervenant et la requérante sur le remboursement des dépens.

11      La requérante n’ayant pas donné suite à la demande de remboursement, l’intervenant a introduit, par acte déposé au greffe du Tribunal le 28 octobre 2024, la présente demande de taxation des dépens.

II.    Conclusions des parties

12      L’intervenant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        fixer le montant des dépens récupérables, dont le remboursement incombe à la requérante, à 28 265,42 euros, au titre de la procédure principale ;

–        fixer le montant des dépens récupérables, dont le remboursement incombe à la requérante à 7 508,16 euros, au titre de la présente procédure de taxation ;

–        assortir les montants à rembourser d’intérêts de retard à compter de la date de l’ordonnance du Tribunal jusqu’au jour du paiement effectif, au taux fixé par la Banque centrale européenne (BCE) pour les opérations de financement applicable pendant la période concernée, majoré de 3,5 % ;

–        délivrer une expédition de l’ordonnance.

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, rejeter la demande de taxation des dépens comme étant irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter la demande de taxation des dépens comme non fondée ;

–        à titre encore plus subsidiaire, fixer le montant des dépens récupérables, dans le cadre de la procédure principale, à un montant maximal de 13 665,25 euros et ;

–        fixer le montant des dépens récupérables, dans le cadre de la présente procédure, à un montant maximal de 1 800 euros ;

–        pour le surplus, rejeter les conclusions de l’intervenant comme étant non fondées.

III. En droit

A.      Sur la recevabilité de la demande de taxation des dépens

14      La requérante soutient que la demande de taxation des dépens est irrecevable. Elle fait valoir que l’intervenant n’a pas fait preuve d’une réelle volonté de négociation et s’est comporté de manière contradictoire.

15      Il convient de rappeler que, selon l’article 170, paragraphe 3, du règlement de procédure, s’il y a contestation sur les dépens récupérables, le Tribunal statue par voie d’ordonnance non susceptible de recours à la demande de la partie intéressée, après avoir mis la partie concernée par la demande en mesure de présenter ses observations.

16      De cette disposition découle la nécessité d’examiner l’existence d’une contestation sur les dépens récupérables préalablement au dépôt de la demande de taxation des dépens [voir ordonnance du 21 juillet 2020, Bodegas Altún/EUIPO – Codorníu (ANA DE ALTUN), T‑334/18 DEP, EU:T:2020:352, point 12 et jurisprudence citée].

17      À cet égard, il ne saurait être admis qu’une contestation au sens dudit article ne naisse que lorsque la partie destinataire d’une demande de remboursement des dépens avancée par la partie gagnante oppose à celle-ci un refus explicite et intégral. En effet, dans un tel cas, il suffirait qu’une partie, condamnée dans un litige à rembourser les dépens exposés par l’autre partie, s’abstienne de toute réaction ou adopte une attitude dilatoire pour que l’introduction d’une demande de taxation des dépens en application de l’article susmentionné soit rendue impossible. Un tel résultat priverait d’effet utile la procédure prévue à l’article 170 du règlement de procédure, qui tend à ce qu’il soit statué définitivement sur les dépens de l’instance (voir, en ce sens, ordonnances du 11 décembre 2014, Longinidis/Cedefop, T‑283/08 P‑DEP, EU:T:2014:1083, point 13, et du 25 mars 2014, Marcuccio/Commission, T‑126/11 P‑DEP, EU:T:2014:171, point 13).

18      En l’espèce, il ressort des échanges entre les parties qu’elles ne se sont pas accordées sur le montant à rembourser. Ainsi, l’intervenant a fixé un délai au-delà duquel il se réservait le droit d’introduire une demande de taxation des dépens. Bien qu’il y ait eu encore des échanges de courriels entre les parties postérieurement à cette date, il ne saurait être reproché à l’intervenant d’avoir entamé la présente procédure en l’absence d’un accord.

19      Par conséquent, il y a lieu de considérer que, à la date d’introduction de la présente demande, l’intervenant a démontré suffisamment qu’il existait une contestation sur les dépens récupérables. La demande est ainsi recevable.

B.      Sur le bien-fondé de la demande de taxation des dépens

20      Aux termes de l’article 140, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et qui ont été indispensables à cette fin (voir ordonnance du 6 mars 2003, Nan Ya Plastics et Far Eastern Textiles/Conseil, T‑226/00 DEP et T‑227/00 DEP, EU:T:2003:61, point 33 et jurisprudence citée).

21      En fixant les dépens récupérables, le Tribunal tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de l’ordonnance de taxation des dépens, y compris des frais indispensables afférents à la procédure de taxation des dépens (voir ordonnance du 21 janvier 2015, Hangzhou Duralamp Electronics/Conseil, T‑459/07 DEP, non publiée, EU:T:2015:68, point 18 et jurisprudence citée).

22      En l’espèce, l’intervenant demande, premièrement, le remboursement des frais engagés dans le cadre de la procédure principale, deuxièmement, le remboursement des dépens afférents à la présente procédure de taxation des dépens et, troisièmement, des intérêts de retard sur le montant total.

23      Avant d’examiner ces demandes, il convient d’écarter l’argument de la requérante selon lequel la demande de taxation des dépens doit être rejetée en raison des créances qu’elle détiendrait à l’encontre de l’intervenant. En effet, il ressort de l’article 170, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure que la finalité de la procédure de taxation des dépens est de statuer sur le montant des dépens récupérables à la suite d’une décision du Tribunal dans laquelle celui-ci a condamné une partie à supporter totalement ou partiellement les dépens d’une autre partie. Cette procédure ne vise donc pas à statuer de manière plus étendue sur les créances et les dettes entre les parties.

1.      Sur les dépens afférents à la procédure principale

24      L’intervenant se prévaut de divers honoraires et frais, à savoir, en premier lieu, des honoraires d’avocat, facturés selon un tarif horaire de 290 euros, à hauteur de 23 752,45 euros et, en deuxième lieu, de divers « frais de bureau », à hauteur de 1 187,62 euros.

a)      Sur les honoraires d’avocat

25      Il est de jurisprudence constante que le juge de l’Union est habilité non à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces rémunérations peuvent être récupérées auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils [voir ordonnance du 26 janvier 2017, Nürburgring/EUIPO – Biedermann (Nordschleife), T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 10 et jurisprudence citée].

26      Il convient également de rappeler que, à défaut de dispositions du droit de l’Union de nature tarifaire ou relatives au temps de travail nécessaire, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a présentés pour les parties [voir ordonnance du 26 janvier 2017, Nürburgring/EUIPO – Biedermann (Nordschleife), T‑181/14 DEP, EU:T:2017:41, point 11 et jurisprudence citée].

27      C’est en fonction de ces considérations qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce.

1)      Sur l’objet, la nature et l’importance du litige sous l’angle du droit de l’Union, les difficultés de la cause, ainsi que sur l’intérêt économique du litige pour l’intervenant

28      S’agissant de l’objet et de la nature du litige, il convient de relever que, dans la décision attaquée, la Commission a examiné, l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, en faveur de l’aéroport de Francfort-Hahn. Ensuite, la Commission ayant considéré que certaines des mesures en faveur de l’aéroport de Francfort‑Hahn étaient constitutives d’une aide d’État, elle a examiné leur compatibilité avec le marché intérieur.

29      Les mesures examinées dans la décision attaquée, comprenaient, d’abord, une ligne de crédit ouverte par le pool de trésorerie de l’intervenant, dont la Commission a estimé qu’elle constituait une aide d’État compatible avec le marché intérieur au titre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE. Ensuite, les mesures examinées incluaient cinq prêts d’une banque publique, dont la Commission a considéré que, d’une part, trois ne constituaient pas des aides d’État et, d’autre part, deux constituaient des aides d’État compatibles avec le marché intérieur au titre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE. Enfin, l’une des mesures examinées était une garantie publique relative aux cinq prêts susmentionnés que la Commission a estimée comme constituant une aide d’État compatible avec le marché intérieur au titre de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE.

30      S’agissant de l’importance du litige sous l’angle du droit de l’Union, la question centrale que posait l’affaire était celle de savoir si la décision attaquée était susceptible de léser les intérêts légitimes de la requérante en affectant substantiellement sa position sur le marché en cause. À cet égard, il y a lieu de relever que même si l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission avait été jointe au fond, le Tribunal a rejeté le recours comme irrecevable sur le fondement de l’article 130 du règlement de procédure.

31      S’agissant des difficultés de la cause, il y a lieu de constater que, à l’appui de sa demande en annulation dans le cadre de la procédure principale, la requérante avait soulevé, en substance, six moyens, lesquels étaient tirés, notamment, d’une erreur de procédure et de diverses erreurs de droit dans la décision de la Commission.

32      S’agissant de l’intérêt économique du litige pour l’intervenant, il importe de relever que celui-ci avait réalisé de nombreux efforts, depuis les années 1990, pour créer un aéroport destiné à décharger l’aéroport de Francfort-sur-le-Main et à développer la région du Hunsrück en Allemagne, où se situe l’aéroport de Francfort-Hahn. En outre, l’intervenant était l’associé majoritaire de Flughafen Frankfurt-Hahn GmbH, et avait contribué à son financement (voir, à cet égard, ordonnance du 14 décembre 2017, Deutsche Lufthansa/Commission, T‑764/15, non publiée, EU:T:2017:933, point 18).

33      Par conséquent, il convient de considérer que la procédure principale comportait une faible importance pour le droit des aides d’État de l’Union, un degré de difficulté moyen et un intérêt économique important pour l’intervenant.

2)      Sur l’ampleur de la charge de travail nécessitée par le litige

34      En ce qui concerne l’ampleur du travail que la procédure principale a pu engendrer pour le représentant de l’intervenant, il y a lieu de rappeler que le juge de l’Union n’est pas lié par le décompte déposé par la partie qui entend récupérer des dépens. Il lui appartient de tenir principalement compte du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure devant le Tribunal (voir, en ce sens, ordonnance du 21 décembre 2023, British Airways/Commission, T‑48/11 DEP, non publiée, EU:T:2023:867, point 29 et jurisprudence citée).

35      Par ailleurs, il importe de souligner que la possibilité pour le juge de l’Union d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies [voir, en ce sens, ordonnance du 17 septembre 2019, Mozzetti/EUIPO – di Lelio (Alfredo alla Scrofa et ALFREDO’S GALLERY alla Scrofa Roma), T‑96/15 DEP et T‑97/15 DEP, non publiée, EU:T:2019:658, point 34 et jurisprudence citée].

36      En outre, il convient de noter que, en règle générale, la tâche procédurale d’une partie intervenante est sensiblement facilitée par le travail de la partie principale au soutien de laquelle elle est intervenue. Une intervention étant, par nature, subordonnée à l’action principale, elle ne saurait, dès lors, présenter autant de difficultés que celle-ci, sauf dans des cas exceptionnels. Les honoraires de l’avocat de la partie intervenante ne sauraient, ainsi, en principe, être plus élevés que ceux de la partie principale (voir ordonnance du 18 avril 2006, Euroalliages e.a./Commission, T‑132/01 DEP, non publiée, EU:T:2006:112, point 32 et jurisprudence citée).

37      En l’espèce, la tâche de l’intervenant a été facilitée par le travail de la Commission, au soutien de laquelle il est intervenu, et qui avait déposé son exception d’irrecevabilité et son mémoire en défense, respectivement, le 11 mars 2016 et le 16 octobre 2017 et, par conséquent, avant que l’intervenant ait été admis comme partie intervenante au litige par ordonnance du 14 décembre 2017, Deutsche Lufthansa/Commission (T‑764/15, non publiée, EU:T:2017:933).

38      Afin d’apprécier l’ampleur du travail fourni par le représentant de l’intervenant, il convient de prendre en compte, au titre des prestations que celui-ci a effectuées, premièrement, la rédaction de la demande d’intervention (huit pages), deuxièmement, la rédaction du mémoire en intervention (20 pages) et, troisièmement, la rédaction des observations sur les nouvelles preuves produites par la requérante le 27 août 2018 et sur la confidentialité (treize pages).

39      L’intervenant produit un tableau récapitulatif faisant état de diverses tâches pour la période allant du 12 janvier 2016 au 15 octobre 2019 effectuées par une seule personne, le professeur Koenig, au titre de la représentation de l’intervenant et qui comprend le détail de trois factures différentes. L’intervenant réclame le remboursement d’un montant de 23 752,45 euros, correspondant à un total de 81,91 heures de travail à un taux horaire de 290 euros.

40      Il ressort dudit tableau, premièrement, que 4,91 heures ont été prises en compte au titre de la préparation de la demande en intervention, deuxièmement, que 46,95 heures ont été prises en compte au titre de la préparation du mémoire en intervention, troisièmement, que 20,925 heures ont été prises en compte au titre de la rédaction des observations sur la nouvelle preuve produite par la requérante. Il ressort également dudit tableau que 9,12 heures ont été prises en compte au titre de l’analyse des diverses pièces du dossier et des écritures déposées par les autres parties.

41      Il convient donc d’examiner si les 81,91 heures de travail étaient objectivement nécessaires par rapport aux prestations fournies et si le taux horaire appliqué dans ce cadre était justifié.

42      À titre liminaire, il importe d’observer que le professeur Koenig avait déjà représenté l’intervenant dans le cadre de la procédure administrative devant la Commission. Or, il ressort de la jurisprudence que, lorsque les avocats d’une partie l’ont déjà assistée au cours de procédures ou de démarches qui ont précédé le litige s’y rapportant, il convient de tenir compte du fait que ces avocats disposent d’une connaissance d’éléments pertinents pour le litige qui est de nature à avoir facilité leur travail et réduit le temps de préparation nécessaire pour la procédure contentieuse (ordonnances du 8 novembre 2001, Kish Glass/Commission, T‑65/96 DEP, EU:T:2001:261, point 25, et du 7 décembre 2004, Lagardère et Canal/Commission, T‑251/00 DEP, EU:T:2004:353, points 29 et 30). Sur ce point, l’intervenant indique qu’il a réduit d’un tiers les montants réclamés au titre de la rédaction de la demande d’intervention et de l’étude du dossier.

43      En outre, tel que relevé au point 36 ci-dessus, en règle générale, la tâche procédurale d’une partie intervenante est sensiblement facilitée par le travail de la partie principale au soutien de laquelle elle est intervenue.

44      Il résulte des considérations exposées ci-dessus que, d’abord, s’agissant des 46,95 heures de travail consacrées à l’élaboration du mémoire en intervention, elles paraissent excessives. Il y a lieu de considérer que seules 25 heures pour la rédaction d’un tel mémoire constituent la limite de ce qui pourrait être considéré comme indispensable en l’espèce.

45      Ensuite, s’agissant des 20,925 heures de travail prises en compte au titre de la rédaction des observations sur la nouvelle preuve produite par la requérante, il y a lieu de considérer que seules 10 heures apparaissent nécessaires aux fins de préparer de telles observations.

46      Enfin, s’agissant des 9,12 heures de travail prises en compte au titre de l’analyse des mémoires et des pièces déposées par les autres parties au litige, s’il peut être admis que l’intervenant ait pris en compte quelques heures afin d’analyser lesdites écritures, en sus des heures prises en compte au titre de la rédaction des écritures, seules 5 heures apparaissent comme étant objectivement nécessaires à ces fins.

47      Par conséquent, il y a lieu de fixer à 44,91 le nombre d’heures pour déterminer les honoraires d’avocat récupérables.

48      En ce qui concerne le taux horaire de 290 euros pour les honoraires d’avocat réclamés par l’intervenant, la requérante considère que ce taux est clairement excessif.

49      Il y a lieu de rappeler que, en l’absence, dans l’état actuel du droit de l’Union, de barème à cet égard, ce n’est que dans l’hypothèse où le taux horaire facturé apparaît manifestement excessif que le Tribunal peut s’en écarter et fixer ex æquo et bono le montant des honoraires d’avocat et des experts économistes récupérables (voir, en ce sens, ordonnance du 19 janvier 2021, Romańska/Frontex, T‑212/18 DEP, non publiée, EU:T:2021:30, point 39 et jurisprudence citée).

50      Au vu des caractéristiques de la présente affaire, notamment, de sa faible importance pour le droit des aides d’État de l’Union, de son degré de difficulté moyen, de l’intérêt économique important qu’elle représentait pour l’intervenant et de l’ampleur du travail qu’elle a engendré pour son représentant, le Tribunal considère que le taux facturé de 290 euros n’apparaît pas manifestement excessif, un tel taux étant considéré comme raisonnable pour le type de contentieux en cause en l’espèce.

51      Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient donc d’évaluer le montant des honoraires d’avocat récupérables à 13 023,90 euros.

b)      Sur les frais généraux

52      Il ressort du tableau mentionné au point 39 ci-dessus et des explications de l’intervenant que ce dernier a réduit une grande partie des indications de temps de travail du professeur Koenig de 5 % au titre des tâches administratives afin d’éviter que ces tâches soient facturées en tant qu’honoraires d’avocat au taux de 290 euros. En outre, s’agissant des frais généraux, l’intervenant se fonde sur un montant forfaitaire correspondant à 5 % des honoraires d’avocat récupérables et chiffre par conséquent ces frais à 1 187,62 euros, soit 5 % de 23 752,45 euros.

53      Il importe toutefois de relever, ainsi que le fait remarquer la requérante, qu’il ressort de la demande de taxation des dépens et du tableau mentionné au point 39 ci-dessus que l’intervenant n’a pas inclus ledit montant de 1 187,62 euros dans le montant de 28 265,42 euros qu’il demande au titre de la procédure principale.

54      Dans ces conditions, il ne convient pas d’inclure le montant de 1 187,62 euros dans le montant total des dépens récupérables par l’intervenant auprès de la requérante au titre de la procédure principale.

2.      Sur les frais afférents à la présente procédure de taxation des dépens

55      En ce qui concerne le montant de 7 508,16 euros réclamé par l’intervenant pour la conduite de la présente procédure de taxation des dépens, il convient de rappeler que, en fixant les dépens récupérables, le Tribunal tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de la signature de l’ordonnance de taxation des dépens, y compris des frais indispensables afférents à la procédure de taxation des dépens [voir ordonnance du 11 avril 2019, Stada Arzneimittel/EUIPO – Urgo recherche innovation et développement (Immunostad), T‑403/16 DEP, non publiée, EU:T:2019:249, point 31 et jurisprudence citée].

56      Selon une jurisprudence constante, une demande de taxation des dépens présente un caractère plutôt standardisé et se distingue, en principe, par l’absence de toute difficulté pour l’avocat qui a déjà traité du fond de l’affaire [voir ordonnance du 11 avril 2019, Stada Arzneimittel/EUIPO – Urgo recherche innovation et développement (Immunostad), T‑403/16 DEP, non publiée, EU:T:2019:249, point 32 et jurisprudence citée].

a)      Sur les honoraires d’avocat

57      En l’espèce, l’intervenant produit un tableau récapitulatif commun aux affaires ayant donné lieu aux arrêts du 15 juillet 2021, Deutsche Lufthansa/Commission (C‑453/19 P, EU:C:2021:608) et du 20 janvier 2022, Deutsche Lufthansa/Commission (C‑594/19 P, EU:C:2022:40), à l’ordonnance du 17 mai 2019, Deutsche Lufthansa/Commission (T‑764/15, non publiée, EU:T:2019:349) et à la procédure principale faisant état d’un montant total de 25 237,50 euros au titre des honoraires d’avocat. Ce tableau prend en compte 87,03 heures de travail par le cabinet Kapellmann entre le 5 février 2022 et le 27 octobre 2024, aux taux horaires de 320 euros, 350 euros et 380 euros. Ainsi, le montant imputable à la présente procédure de taxation des dépens correspondrait à 6 309,37 euros, soit un quart du montant total.

58      Compte tenu des taux horaires appliqués, les avocats de l’intervenant doivent être considérés comme des avocats expérimentés qui accomplissent leur mission de façon efficace et rapide. En effet, il ressort du dossier dont dispose le Tribunal que quatre nouveaux avocats sont intervenus et ont appliqué un tarif horaire de 380 euros, 350 euros et 320 euros. Selon la jurisprudence, la prise en compte d’un taux horaire d’un niveau élevé doit avoir pour contrepartie une évaluation nécessairement stricte du nombre total d’heures de travail indispensables aux fins de la procédure contentieuse (voir ordonnance du 30 avril 2018, European Dynamics Belgium e.a./EMA, T‑158/12 DEP, non publiée, EU:T:2018:295, point 23 et jurisprudence citée).

59      Or, conformément à la jurisprudence rappelée au point 57 ci-dessus, la présente demande de taxation des dépens ne saurait être qualifiée de complexe.

60      Eu égard à ce qui précède, la somme de 6 309,37 euros apparaît excessive et il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables au titre de la présente procédure en les fixant à un montant de 2 500 euros au titre des honoraires d’avocat.

b)      Sur les frais généraux

61      Au titre des diverses « tâches administratives » accomplies, le tableau mentionné au point 57 ci-dessus fait état d’un montant de 1 261,88 euros, soit 5 % de 25 237,50 euros pour les quatre affaires visées à ce point.

62      Or, il ressort de la demande de taxation des dépens et de ce tableau, que le montant de 7 508,16 euros réclamés au titre de la présente procédure de taxation des dépens n’inclut pas des frais généraux. Dans ces conditions, il ne convient pas d’inclure les frais généraux dans le montant total des dépens récupérables par l’intervenant auprès de la requérante au titre de la présente procédure de taxation des dépens.

3.      Sur la taxe sur la valeur ajoutée

63      L’intervenant demande le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les honoraires d’avocat au taux de 19 %. Il indique qu’il n’a pas de droit de déduction fiscale à cet égard, selon la loi allemande.

64      À cet égard, il y lieu de relever que, lorsqu’une personne physique ou morale est assujettie à la TVA, elle a le droit de récupérer auprès des autorités fiscales la TVA payée sur les biens et les services qu’elle achète. La TVA ne représente donc pas pour elle une dépense, de sorte que les montants acquittés au titre de cette taxe ne doivent pas être pris en compte aux fins du calcul des dépens récupérables. Partant, le montant réclamé au titre de la TVA est considéré comme des dépens récupérables seulement si la personne physique ou morale qui réclame ce montant établit qu’elle n’est pas assujettie à la TVA  [voir, en ce sens, ordonnance du 29 juin 2015, Reber/OHMI – Klusmeier (Wolfgang Amadeus Mozart PREMIUM), T‑530/10 DEP, non publiée, EU:T:2015:482, point 49 et jurisprudence citée].

65      Étant donné que l’intervenant a indiqué que, selon la loi allemande, il n’a pas le droit de déduire la TVA sur les honoraires d’avocat, circonstance que la requérante ne conteste pas, il convient de considérer que la TVA au taux de 19 % sur les montants de 13 023,90 euros et 2 500 euros doit être incluse dans les dépens récupérables (voir, en ce sens, ordonnance du 6 octobre 2011, Kronoply et Kronotex/Commission T‑388/02 DEP, non publiée, EU:T:2011:572, point 27).

4.      Sur les intérêts de retard

66      L’intervenant demande au Tribunal de condamner la requérante à lui verser des intérêts de retard sur le montant des dépens à rembourser à compter de la signification de l’ordonnance de taxation jusqu’au paiement de ceux-ci.

67      La requérante estime que l’intervenant n’a pas droit à des intérêts de retard. D’une part, les indications de temps du professeur Koenig n’auraient pas été correctement ventilées. D’autre part, l’intervenant aurait agi de mauvaise foi.

68      Selon une jurisprudence bien établie, une demande de majoration de la somme due dans le cadre d’une procédure de taxation de dépens d’intérêts de retard doit être accueillie pour la période comprise entre la date de la signification de l’ordonnance de taxation des dépens et la date du remboursement effectif des dépens (voir ordonnance du 27 novembre 2020, Flabeg Deutschland/Commission, T‑103/15 DEP, non publiée, EU:T:2020:585, point 60 et jurisprudence citée). À cet égard, les arguments de la requérante exposés au point précédent ne sont pas pertinents.

69      Le taux d’intérêt applicable est calculé, compte tenu de l’article 99, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) no 1296/2013, (UE) no 1301/2013, (UE) no 1303/2013, (UE) no 1304/2013, (UE) no 1309/2013, (UE) no 1316/2013, (UE) no 223/2014, (UE) no 283/2014 et la décision no 541/2014/UE, et abrogeant le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 (JO 2018, L 193, p. 1), sur la base du taux appliqué par la BCE à ses opérations principales de refinancement et en vigueur le premier jour de calendrier du mois de l’échéance du paiement, majoré de trois points et demi de pourcentage (ordonnance du 25 septembre 2019, Bilbaína de Alquitranes e.a./Commission, T‑689/13 DEP, non publiée, EU:T:2019:698, point 58).

70      Par conséquent, le montant des dépens récupérables produira, à compter de la signification de la présente ordonnance, des intérêts de retard au taux calculé sur la base du taux fixé par la BCE pour les opérations principales de refinancement applicable pendant la période concernée, majoré de trois points et demi de pourcentage.

71      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par l’intervenant en fixant leur montant à 18 473 euros, la TVA comprise, lequel montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de la présente ordonnance.

5.      Sur la demande d’expédition de l’ordonnance aux fins d’exécution

72      Dans son quatrième chef de conclusions, l’intervenant demande à ce que lui soit délivrée une expédition de la présente ordonnance.

73      À cet égard, d’une part, il suffit de constater que, conformément à l’article 280 TFUE, la présente ordonnance a force exécutoire dans les conditions fixées à l’article 299 TFUE. D’autre part, même si l’article 170, paragraphe 4, du règlement de procédure offre expressément la faculté aux parties de demander une expédition de l’ordonnance aux fins d’exécution, il n’y a pas lieu de statuer formellement sur une telle demande, puisque celle-ci est de nature purement administrative et se situe en dehors de l’objet du présent litige portant sur la taxation des dépens récupérables des parties [voir, en ce sens, ordonnance du 6 juin 2019, Damm/EUIPO – Schlossbrauerei Au, Willibald Beck Freiherr von Peccoz (EISKELLER), T‑859/16 DEP, non publiée, EU:T:2019:402, point 32 et jurisprudence citée].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

ordonne :

1)      Le montant total des dépens à rembourser par Deutsche Lufthansa AG au Land Rheinland-Pfalz est fixé à 18 473 euros, la taxe sur la valeur ajoutée comprise.

2)      Ce montant porte intérêts de retard à compter de la date de signification de la présente ordonnance jusqu’à la date du paiement. Le taux d’intérêt applicable est calculé sur la base du taux fixé par la Banque centrale européenne (BCE) pour les opérations principales de refinancement et en vigueur le premier jour calendaire du mois de l’échéance du paiement, majoré de trois points et demi de pourcentage.

Fait à Luxembourg, le 4 septembre 2025.

Le greffier

 

Le président

V. Di Bucci

 

L. Truchot


*      Langue de procédure : l’allemand.