Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 18 septembre 2025 (1)

Affaire C131/24

Umweltorganisation VIRUS – Verein Projektwerkstatt für Umwelt und Soziales e. a.

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesverwaltungsgericht (tribunal administratif fédéral, Autriche)]

« Renvoi préjudiciel – Environnement – Directive 2009/147/CE – Conservation des oiseaux sauvages – Interdiction de la perturbation intentionnelle des oiseaux – Projet de construction d’une route nationale susceptible de perturber quelques spécimens de certaines espèces – Mesures d’amélioration des habitats – Preuve de l’efficacité – Avis d’un expert »






I.      Introduction

1.        L’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » (2) prévoit une interdiction de perturber intentionnellement les oiseaux pour autant que cette perturbation ait un effet significatif eu égard aux objectifs de la directive. Il ressort de la jurisprudence que cette interdiction couvre également les perturbations dont on accepte simplement la possibilité (3). Une perturbation relève-t-elle toutefois aussi de l’interdiction lorsque ses effets préjudiciables sur l’habitat des oiseaux sont compensés, en d’autres lieux, par une amélioration de l’habitat des espèces concernées ? Et comment l’efficacité de cette mesure d’amélioration devrait-elle être appréciée avant sa mise en œuvre ? Voilà les questions que le Bundesverwaltungsgericht (tribunal administratif fédéral, Autriche) adresse à la Cour.

II.    Le cadre juridique

A.      La directive « oiseaux »

2.        Les objectifs de la directive « oiseaux » sont précisés dans ses considérants 3, 5, 7 et 8 :

« 3.       Sur le territoire européen des États membres, un grand nombre d’espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage subissent une régression de leur population, très rapide dans certains cas, et cette régression constitue un danger sérieux pour la conservation du milieu naturel, notamment à cause des menaces qu’elle fait peser sur les équilibres biologiques.

4.      [...]

5.      La conservation des espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des États membres est nécessaire à la réalisation des objectifs de la Communauté dans les domaines de l’amélioration des conditions de vie et du développement durable.

6.      [...]

7.      La conservation a pour objet la protection à long terme et la gestion des ressources naturelles en tant que partie intégrante du patrimoine des peuples européens. Elle permet la régulation de ces ressources et réglemente leur exploitation sur la base de mesures nécessaires au maintien et à l’adaptation des équilibres naturels des espèces dans les limites de ce qui est raisonnablement possible.

8.      La préservation, le maintien ou le rétablissement d’une diversité et d’une superficie suffisantes d’habitats sont indispensables à la conservation de toutes les espèces d’oiseaux. Certaines espèces d’oiseaux doivent faire l’objet de mesures de conservation spéciale concernant leur habitat afin d’assurer leur survie et leur reproduction dans leur aire de distribution. Ces mesures doivent également tenir compte des espèces migratrices et être coordonnées en vue de la constitution d’un réseau cohérent. »

3.        Le considérant 10 de la directive « oiseaux » exige notamment de maintenir certaines espèces à « niveau satisfaisant » :

« En raison de leur niveau de population, de leur distribution géographique et de leur taux de reproduction dans l’ensemble de la Communauté, certaines espèces peuvent faire l’objet d’actes de chasse, ce qui constitue une exploitation admissible, pour autant que certaines limites soient établies et respectées, ces actes de chasse devant être compatibles avec le maintien de la population de ces espèces à un niveau satisfaisant. »

4.        L’article 1er de la directive « oiseaux » règle son champ d’application :

« La présente directive concerne la conservation de toutes les espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des États membres auquel le traité est applicable. Elle a pour objet la protection, la gestion et la régulation de ces espèces et en réglemente l’exploitation. »

5.        L’article 2 de la directive « oiseaux » couvre l’obligation fondamentale pesant sur les États membres en ce qui concerne la conservation des espèces d’oiseaux :

« Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour maintenir ou adapter la population de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu des exigences économiques et récréationnelles. »

6.        L’article 3 de la directive « oiseaux » pose des obligations générales en vue de la mise en œuvre de l’article 2 :

« 1.       Compte tenu des exigences mentionnées à l’article 2, les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour préserver, maintenir ou rétablir une diversité et une superficie suffisantes d’habitats pour toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er.

2.       La préservation, le maintien et le rétablissement des biotopes et des habitats comportent en premier lieu les mesures suivantes :

a)       création de zones de protection ;

b)       entretien et aménagement conformes aux impératifs écologiques des habitats se trouvant à l’intérieur et à l’extérieur des zones de protection ;

c)       rétablissement des biotopes détruits ;

d)       création de biotopes. » 

7.        L’article 5 de la directive « oiseaux » énonce des interdictions qui s’appliquent sans distinction de zones :

« Sans préjudice des articles 7 et 9, les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un régime général de protection de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er et comportant notamment l’interdiction :

[...]

d)      de les perturber intentionnellement, notamment durant la période de reproduction et de dépendance, pour autant que la perturbation ait un effet significatif eu égard aux objectifs de la présente directive ; » 

8.        L’article 9, paragraphe 1, de la directive « oiseaux » autorise des dérogations aux interdictions de l’article 5 :

« 1.       Les États membres peuvent déroger aux articles 5 à 8 s’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante, pour les motifs ci-après :

a)      –       dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques,

–       dans l’intérêt de la sécurité aérienne,

–       pour prévenir les dommages importants aux cultures, au bétail, aux forêts, aux pêcheries et aux eaux,

–       pour la protection de la flore et de la faune ;

b)      pour des fins de recherche et d’enseignement, de repeuplement, de réintroduction ainsi que pour l’élevage se rapportant à ces actions ;

c)      pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la capture, la détention ou toute autre exploitation judicieuse de certains oiseaux en petites quantités. » 

B.      La directive « habitats »

9.        L’article 6, paragraphe 3, de la directive « habitats » (4) réglemente l’évaluation des incidences :

« Tout plan ou projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site mais susceptible d’affecter ce site de manière significative, individuellement ou en conjugaison avec d’autres plans et projets, fait l’objet d’une évaluation appropriée de ses incidences sur le site eu égard aux objectifs de conservation de ce site. Compte tenu des conclusions de l’évaluation des incidences sur le site et sous réserve des dispositions du paragraphe 4, les autorités nationales compétentes ne marquent leur accord sur ce plan ou projet qu’après s’être assurées qu’il ne portera pas atteinte à l’intégrité du site concerné et après avoir pris, le cas échéant, l’avis du public. »

10.      L’article 12, paragraphe 1, de la directive « habitats » contient des interdictions fondamentales en matière de protection des espèces :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l’annexe IV point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant :

a)      toute forme de capture ou de mise à mort intentionnelle de spécimens de ces espèces dans la nature ;

b)      la perturbation intentionnelle de ces espèces notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d’hibernation et de migration ;

c)      la destruction ou le ramassage intentionnels des œufs dans la nature ;

d)      la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos. »

11.      L’article 16, paragraphe 1, de la directive « habitats » prévoit des dérogations à l’article 12 :

« À condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, les États membres peuvent déroger aux dispositions des articles 12, 13, 14 et de l’article 15 points a) et b) :

a)      dans l’intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ;

b)      pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l’élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d’autres formes de propriété ;

c)      dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques, ou pour d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l’environnement ;

d)      à des fins de recherche et d’éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ;

e)      pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d’une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d’un nombre limité et spécifié par les autorités nationales compétentes de certains spécimens des espèces figurant à l’annexe IV. »

III. Les faits et la demande de décision préjudicielle

12.      Le 12 novembre 2019, le gouvernement du Land de Basse‑Autriche a autorisé le projet de construction routière litigieux après une évaluation des incidences sur l’environnement. L’organisation de protection de l’environnement VIRUS – Verein Projektwerkstatt für Umwelt und Soziales, ainsi que d’autres citoyens et autres associations de protection de l’environnement ont formé un recours auprès du Bundesverwaltungsgericht (tribunal administratif fédéral, Autriche) contre cette autorisation faisant notamment valoir que les dispositions relatives à la protection des espèces au titre de la directive « oiseaux » sont violés. Diverses espèces d’oiseaux, notamment d’oiseaux des milieux forestiers comme le pic mar (Dendrocopos medius ou Leiopicus medius), utilisent des surfaces qui seraient affectées, entre autres, par le bruit provenant de la nouvelle route.

13.      D’après le rapport d’un expert en matière de protection de la nature consulté par le tribunal, il y a toutefois lieu de s’attendre à ce que les espèces d’oiseaux concernées bénéficient de la limitation, prévue dans le projet, des périodes de construction de l’ouvrage à des mois bien déterminés ainsi que des mesures d’amélioration des habitats sur des surfaces situées en dehors de la zone d’immission, qui peuvent être formulées à titre de condition.

14.      Les parties s’opposent dans le cadre de la procédure, plus particulièrement, au sujet de l’efficacité des mesures proposées par le maître d’ouvrage, d’amélioration forestière et de sauvegarde des vieux arbres, à une distance d’au moins 300 mètres de la route, sur une surface totale de 6,6 hectares dans le cadre d’un espace régional de mesures en faveur du pic mar et d’autres espèces d’oiseaux du milieu forestier.

15.      D’après le rapport des deux experts mandatés dans le cadre de la procédure, si les mesures proposées sont réalisées, aucune perturbation des espèces concernées susceptible d’avoir un effet significatif eu égard aux objectifs de la directive « oiseaux » ne se produira. Les mesures ne permettraient toutefois pas de réduire la perturbation de certains spécimens individuels dans la forêt concrètement concernée par le projet. Selon l’appréciation portée par les experts, les mesures proposées assurent toutefois la sauvegarde de l’habitat de ces espèces et les conditions requises pour qu’elles y nichent.

16.      L’expert a indiqué devant la juridiction de renvoi qu’il n’avait pas connaissance de travaux remettant en cause l’adéquation des mesures envisagées pour protéger le pic mar. Il n’y aurait pas non plus d’indications en ce sens en raison de l’autoécologie de l’espèce. Il n’existerait dès lors aucun doute dûment justifié quant à l’efficacité de ces mesures. Seul ferait encore défaut un suivi complet et scientifiquement fondé qui, non seulement, éliminerait tout doute, mais pourrait même apporter la preuve de l’efficacité des mesures. En réponse à la question du tribunal, de savoir s’il existait un seul cas, documenté de façon fiable, dans lequel les mesures de mise hors exploitation projetées avaient eu pour effet d’empêcher une perturbation du pic mar par un projet, voire auraient conduit à une amélioration de l’état de conservation de l’espèce aux alentours du projet, l’expert a déclaré ne pas avoir trouvé d’étude aussi univoque, et ce en dépit de recherches intensives et d’échanges d’expériences avec des collègues.

17.      Le Bundesverwaltungsgericht (tribunal administratif fédéral, Autriche) adresse par conséquent les questions suivantes à la Cour :

1)      Convient-il d’interpréter l’article 5 de la directive « oiseaux » en ce sens qu’il n’y a pas de perturbation intentionnelle, au sens de la disposition sous d) de cet article, lorsqu’il est certes possible qu’une perturbation de spécimens isolés de certaines espèces se produise, mais que des mesures qui sont mises en œuvre en temps utile et de façon appropriée et effective permettent de prévenir tout effet eu égard aux objectifs de l’article 2 de cette directive ?

2)      En cas de réponse affirmative à la première question : Pour que tout doute scientifique quant à l’efficacité des mesures soit exclu, l’évaluation technique, dûment motivée, d’un expert judiciaire suffit-elle ou faut-il, au contraire, disposer d’une documentation scientifique objective attestant d’expériences pratiques positives concernant ces mesures ?

18.      L’organisation de protection de l’environnement VIRUS – Verein Projektwerkstatt für Umwelt und Soziales à laquelle s’est jointe l’initiative citoyenne « Nein zur Spange Wörth », le gouvernement du Land de Basse-Autriche, la société Autobahnen- und Schnellstraßen‑Finanzierungs-Aktiengesellschaft (ASFINAG), la ville de Sankt Pölten, la République d’Autriche, la République tchèque, le Royaume de Suède ainsi que la Commission européenne ont présenté des observations écrites.

19.      La Cour a renoncé, en application de l’article 76, paragraphe 2, du règlement de procédure, à tenir une audience de plaidoiries parce qu’elle se jugeait suffisamment informée pour statuer.

20.      Elle a néanmoins suspendu la procédure le 19 novembre 2024 afin d’attendre le prononcé de l’arrêt du 1er août 2025, Voore Mets et Lemeks Põlva (C‑784/23, EU:C:2025:609).

IV.    Appréciation en droit

21.      Les deux questions préjudicielles ont pour toile de fond le fait que, tant la construction, que l’exploitation de la route litigieuse perturberaient en particulier le pic mar, mais aussi d’autres espèces d’oiseaux du milieu forestier. La juridiction de renvoi souhaiterait par conséquent voir précisé si l’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » fait obstacle au projet.

22.      En vertu de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux », les États membres doivent interdire la perturbation intentionnelle d’espèces d’oiseaux européens, notamment durant la période de reproduction et de dépendance pour autant que la perturbation ait un effet significatif eu égard aux objectifs de la directive.

23.      Cette interdiction vient compléter d’autres interdictions prévues à l’article 5, sous a) à sous c), de cette même directive, qui visent en particulier la mise à mort ou la capture intentionnelles de ces espèces ainsi que la destruction ou l’endommagement de leurs nids et des œufs. La Cour a récemment jugé que ces interdictions s’appliquent, non seulement aux activités humaines qui ont pour objet de porter atteinte aux oiseaux, mais aussi à celles pour lesquelles la possibilité d’une telle atteinte est acceptée bien qu’elles n’aient pas manifestement un tel objectif (5).

24.      Afin de prévenir que l’interdiction de perturbation ne s’applique, il est envisagé de mettre en œuvre des mesures d’amélioration forestière et de sauvegarde des vieux arbres, à une distance d’au moins 300 mètres de la route, sur une surface totale de 6,6 hectares dans le cadre d’un espace régional de mesures en faveur du pic mar et d’autres espèces d’oiseaux du milieu forestier. Certains vieux arbres qui seraient sinon le cas échéant abattus devraient autrement être préservés.

25.      Il y a un grand intérêt à prévenir l’application des interdictions de l’article 5 de la directive « oiseaux » par le recours à de telles mesures. Ainsi que je l’ai récemment exposé, une application rigoureuse de ces interdictions restreindrait de manière significative les activités humaines (6). Il est par conséquent douteux qu’elles soient compatibles avec la protection de la propriété et de la liberté économique au titre des articles 16 et 17 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (7). Si l’application des interdictions pouvait en revanche être prévenue par des mesures d’amélioration des habitats en d’autres lieux, ainsi que cela est désormais expressément prévu pour certains projets portant sur l’exploitation d’énergies renouvelables (8), ce conflit serait désamorcé.

26.      Ainsi que je l’exposerai ci-après, une prise en compte des présentes mesures n’est toutefois possible que parce que l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » suppose que la perturbation ait des effets significatifs sur l’objectif de la directive (voir sous A). Les autres interdictions ne contiennent pas de telle condition. J’examinerai ensuite, en vue de répondre à la deuxième question, comment l’efficacité de telles mesures doit être appréciée (voir sous B).

A.      Première question – Interdiction de perturbation et mesures compensatoires

27.      Par sa première question, la juridiction de renvoi souhaiterait savoir si l’application de l’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » peut être prévenue par des mesures d’amélioration, en d’autres lieux, des habitats des espèces d’oiseaux concernées.

28.      La juridiction de renvoi soulève en particulier la question de savoir si l’arrêt People over Wind (9) s’oppose à la prise en compte de ces mesures (voir sous 1). Cet arrêt concerne la préévaluation de la nécessité d’une procédure formelle d’évaluation des atteintes aux zones de conservation en vertu de l’article 6, paragraphe 3, de la directive « habitats ». Les mesures compensatoires doivent toutefois être replacées dans la structure réglementaire de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » (voir sous 2).

1.      Arrêt People over Wind

29.      L’arrêt People over Wind concernait certes la prise en compte de mesures de prévention ou de réduction des atteintes dans le domaine de la protection de la nature, mais il n’a, à y regarder de plus près, aucune signification pour l’interprétation de l’interdiction de perturbation.

30.      Il en allait dans cette affaire de la préévaluation de la nécessité d’une procédure formelle d’évaluation des incidences d’un projet sur une zone de conservation concernée conformément à l’article 6, paragraphe 3, première phrase, de la directive « habitats ». D’après cette disposition, tout plan ou projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site, mais susceptible d’affecter ce site de manière significative, individuellement ou en conjugaison avec d’autres plans et projets, fait l’objet d’une évaluation appropriée de ses incidences sur le site eu égard aux objectifs de conservation de ce site.

31.      Lors de la préévaluation si une telle évaluation est même nécessaire, on ne saurait, d’après l’arrêt People over Wind, tenir compte des mesures visant à éviter ou réduire les effets préjudiciables de ce plan ou projet sur le site concerné (10). C’est en effet dans le cadre de la procédure formelle d’évaluation qu’il convient d’évaluer dans quelle mesure de telles mesures sont efficaces, cette évaluation ayant une autre qualité que la préévaluation et contenant des garanties plus étendues (11).

32.      La demande de décision préjudicielle et diverses parties impliquées soulignent, à juste titre, que cette argumentation ne peut déjà pas être transposée à la présente affaire du fait que, à la différence de l’article 6, paragraphe 3, première phrase, de la directive « habitats », pour la protection des sites, l’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » ne prévoit, ni une préévaluation, ni même une procédure formelle d’évaluation dans le cadre de laquelle les incidences d’une perturbation devraient être appréciées.

2.      Place des mesures compensatoires dans la structure réglementaire de l’interdiction de perturbation

33.      La prise en compte de mesures d’amélioration de l’habitat des espèces concernées en d’autres lieux doit au contraire être replacée dans la structure réglementaire de l’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » qui s’oppose aux perturbations qui ont des effets significatifs sur les objectifs de la directive. Il convient donc de se pencher sur les mesures visant à atténuer ou prévenir les perturbations (voir sous a), puis sur l’importance des mesures compensatoires pour la préservation de populations suffisantes d’oiseaux (voir sous b) et enfin sur la situation particulière dans laquelle, du fait de mesures compensatoires, une perturbation n’empêche pas le rétablissement d’une population suffisante d’une espèce (voir sous c).

a)      Mesures visant à atténuer ou prévenir les perturbations

34.      Si des mesures préviennent qu’un projet perturbe les oiseaux, l’interdiction de perturbation de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » n’est pas applicable parce qu’il n’y a pas de perturbation. Et si ces mesures ne préviennent certes pas une perturbation, mais au moins les atténuent, il se peut que la perturbation n’ait pas d’effets significatifs sur les objectifs de la directive « oiseaux ». L’évaluation du point de savoir si l’interdiction de perturbation fait obstacle à un projet doit donc intégrer de telles mesures (12).

35.      C’est dans le même sens que va la prise en compte de mesures visant à l’atténuation ou à la prévention de préjudices dans la procédure formelle d’évaluation au titre de l’article 6, paragraphe 3, première phrase, de la directive « habitats » déjà évoquée. Cette évaluation vise à exposer si un projet porte en soi atteinte à une zone de conservation. Si un projet est lié à des mesures de protection visant à prévenir ou atténuer ses effets préjudiciables sur la zone de conservation concernée, ces mesures doivent naturellement être prises en compte dans le cadre de l’évaluation (13).

36.      On peut certes envisager des mesures grâce auxquelles, dans le cas d’espèce, des perturbations peuvent être prévenues ou atténuées, mais elles ne jouent, d’après les informations disponibles, qu’un rôle limité. Ainsi, seules sont proposées des mesures de limitation dans le temps des périodes de construction qui devraient prévenir que les oiseaux soient perturbés par les activités de construction pendant des périodes particulièrement sensibles.

37.      On pourrait en outre envisager, par exemple, des murs de protection qui atténuent le bruit provoqué par l’utilisation de la route ou les perturbations visuelles ainsi que le risque de collision entre les oiseaux et les véhicules. Des restrictions de l’utilisation comme une interdiction de circulation ou du moins une limitation de vitesse pendant la période de reproduction et de dépendance évoquée à l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » sont également envisageables. La demande de décision préjudicielle ne contient cependant pas d’indications quant à de telles mesures plus étendues visant à prévenir ou atténuer la perturbation.

b)      Mesures compensatoires

38.      Les mesures qui améliorent en d’autres lieux l’habitat des espèces concernées ne sont par contre pas des mesures visant à prévenir ou atténuer les perturbations (14). Ainsi que la juridiction de renvoi le reconnaît, elles ne peuvent manifestement, ni prévenir une perturbation de certains oiseaux, ni atténuer ses effets sur ces oiseaux.

39.      De telles mesures sont plutôt une tentative de compenser les effets de la perturbation. On assume que le bruit rend une partie de l’habitat des espèces concernées moins attractive, voire les chasse complètement de ces espaces. En contrepartie, d’autres surfaces sont améliorées de sorte qu’en définitive, dans l’idéal, au moins autant d’habitat tout aussi approprié vient s’ajouter et est utilisé par les espèces concernées – même s’il ne s’agit éventuellement pas des spécimens concernés.

40.      Étant donné que les mesures compensatoires n’affectent pas la perturbation, elles ne peuvent prévenir l’application de l’interdiction de perturbation que si du fait desdites mesures la perturbation n’a pas d’effets significatifs sur les objectifs de la directive conformément à l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux ».

41.      D’après les considérants 3, 5, 7 et 8 ainsi que l’article 2, lu en combinaison avec le considérant 10, de la directive « oiseaux », cet objectif consiste à maintenir ou à ramener la population de toutes les espèces d’oiseaux européens à un niveau suffisant (15).

42.      D’après l’article 2 de la directive « oiseaux », ce niveau doit correspondre en particulier aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, en tenant compte des exigences économiques et récréationnelles. Les États membres ne sauraient toutefois librement mettre en balance ces facteurs en vue de déterminer le niveau satisfaisant de la population. L’objectif principal est au contraire, d’après l’article 1er, la conservation de toutes les espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des États membres. Par conséquent, comme pour l’état de conservation des espèces, une notion clé de la directive « habitats » (16), il importe de savoir si l’espèce constitue à long terme un élément viable des habitats naturels auxquels elle appartient. Pour cela, les exigences écologiques et scientifiques de l’espèce en cause sont déterminantes. Il doit y avoir en particulier un habitat suffisamment grand de manière durable et l’aire de distribution devrait demeurer au moins stable. Les exigences culturelles, économiques et récréationnelles ne peuvent en revanche entrer en ligne de compte qu’après, et dans la mesure où, la conservation à long terme de l’espèce est assurée.

43.      Du fait du lien avec cet objectif, l’interdiction fait donc obstacle aux perturbations qui réduiraient la population d’une espèce d’oiseaux à tel point que le niveau ne serait plus suffisant ou réduirait encore une population d’un niveau insuffisant.

44.      Lorsqu’une telle perturbation est à prévoir, l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » ne prévoit pas la prise en compte de mesures compensatoires (17). Même si la mesure compensatoire accroît la population de l’espèce, la perturbation réduit tout de même cette population. Rien dans la norme n’indique que l’on pourrait procéder à une compensation entre les deux effets.

45.      En outre, l’efficacité des mesures compensatoires pour la protection des espèces est marquée par une grande incertitude. La deuxième question préjudicielle en est l’illustration. En raison de tels doutes quant à l’efficacité des mesures compensatoires, la Cour refuse régulièrement de les prendre en compte lors de l’appréciation des atteintes aux sites protégés (18).

46.      Un autre argument qui joue un rôle dans le cadre de la discussion quant aux mesures compensatoires pour la protection des sites ne peut en revanche, à première vue, pas être transposée à l’interdiction de perturbation.

47.      S’agissant de la protection des sites, les mesures compensatoires sont réglées en tant que condition des dérogations à la protection des sites au titre de l’article 6, paragraphe 4, de la directive « habitats » sous la forme de mesures de garantie de la cohérence du réseau des sites protégés (Natura 2000). Le législateur les a toutefois combinées dans cette disposition avec des exigences supplémentaires, en particulier un examen des solutions alternatives et la constatation de raisons impératives d’intérêt public majeur. Une prise en compte de mesures compensatoires dans le cadre de l’article 6, paragraphe 3, aurait pour effet de contourner ces exigences supplémentaires (19).

48.      En vertu de l’article 9 de la directive « oiseaux », les dérogations à l’interdiction de perturbation ne supposent en revanche aucune mesure compensatoire. Il n’y aurait donc aucune raison de craindre un contournement de la dérogation.

49.      À y regarder de plus près, une prise en compte des mesures compensatoires dans le cadre de l’interdiction de perturbation pourrait cependant conduire à un contournement encore plus marqué.

50.      En effet, d’après l’article 3 de la directive « oiseaux », les États membres ne sont pas non seulement tenus, indépendamment d’une perturbation, de préserver une diversité et une superficie suffisantes d’habitats pour toutes les espèces d’oiseaux. Ils doivent au contraire aussi rétablir ou créer de tels habitats lorsqu’ils sont insuffisants (20). Le règlement relatif à la restauration de la nature (21) concrétise certes ces obligations et accorde des délais généreux pour les mesures exigées par le règlement. Cela ne change toutefois rien à l’obligation fondamentale prévue à l’article 3 de la directive « oiseaux » qui existe depuis plus de quarante ans et, dans le cas de l’Autriche, depuis son adhésion (22).

51.      Si la population suffisante de l’espèce concernée dépend effectivement de ses habitats – et ce n’est que dans cette hypothèse que les mesures d’amélioration des habitats pourraient avoir une incidence positive sur une population insuffisante –, les États membres devraient ainsi, en vertu de l’article 3 de la directive « oiseaux », de toute façon rétablir ou créer les habitats nécessaires de l’espèce.

52.      Les États membres ne sauraient donc permettre une détérioration supplémentaire de l’état d’une population insuffisante du simple fait que la détérioration est associée à des mesures d’amélioration qui ne suffiraient toutefois pas à atteindre une population suffisante.

53.      Fondamentalement, l’effet de mesures compensatoires ne peut au contraire être pris en compte lors de l’appréciation d’une perturbation que dans la mesure où la population de l’espèce concernée est suffisante en dépit de la perturbation. Savoir si ce résultat est le fruit de mesures compensatoires ou de mesures au titre de l’article 3 de la directive « oiseaux » est alors dénué de pertinence.

c)      Potentiel de rétablissement

54.      Cette conclusion doit néanmoins, comme pour les interdictions de la protection des espèces d’après la directive « habitats » aménagées de manière similaire, être nuancée en ce sens qu’une perturbation peut être exceptionnellement acceptée, même si la population est insuffisante, si elle ne prévient pas le rétablissement d’une population suffisante.

55.      S’agissant de la protection des espèces d’après la directive « habitats », le maintien dans un état de conservation favorable des populations de l’espèce animale concernée dans leur aire de répartition naturelle est une condition d’autorisation des dérogations aux interdictions de l’article 12 de la directive « habitats » prévues à l’article 16, paragraphe 1, de ladite directive (23). Cette condition doit être comprise comme l’exigence évoquée ici d’assurer une population suffisante des espèces d’oiseaux perturbées.

56.      On pourrait en déduire que les dérogations au titre de l’article 16, paragraphe 1, de la directive « habitats » ne sont autorisées qu’en cas d’état de conservation favorable. La Cour autorise cependant à titre exceptionnel des dérogations même en cas d’état de conservation non favorable lorsqu’elles ne sont pas de nature à empêcher le rétablissement d’un état de conservation favorable (24).

57.      Cette constatation concernait une situation dans laquelle la population de l’espèce concernée était certes trop petite pour assumer un état de conservation favorable, mais avait fortement augmenté au cours des années précédentes (25). Il semblait donc plausible de prévoir que l’état de conservation non favorable de l’espèce continuerait à s’améliorer en dépit de la mise à mort de quelques spécimens de sorte qu’un état de conservation favorable pouvait être rétabli. Face à une telle prévision favorable, l’objectif de la directive « habitats » d’établir un état de conservation favorable ne requiert pas qu’un État membre, en dépit d’intérêts sinon prépondérants, attende qu’un état de conservation favorable soit atteint pour autoriser une atteinte. La Cour a donc reconnu qu’une dérogation pour l’espèce en cause peut être neutre même si elle conduit à la perte de quelques spécimens.

58.      Or, si la possibilité d’un rétablissement d’un état de conservation favorable suffit en cas de dérogation à l’interdiction de mise à mort en vertu de l’article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive « habitats », les objectifs de la directive « oiseaux » doivent a fortiori être satisfaits en ce qui concerne l’interdiction de perturbation des oiseaux d’après l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » si une perturbation n’empêche pas le rétablissement d’une population suffisante.

59.      Les perturbations ont en effet des effets préjudiciables nettement moins importants que les mises à mort. Dans le même temps, les perturbations surviennent de par leur nature même nettement plus souvent que les mises à mort. En outre, les interdictions de la directive « oiseaux » s’appliquent à tous les oiseaux et ont donc un champ d’application nettement plus étendu que les interdictions de la directive « habitats » qui ne valent que pour quelques rares espèces. L’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » peut donc restreindre les activités humaines de manière nettement plus importante que l’interdiction de mise à mort en vertu de l’article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive « habitats ».

60.      Lors de l’évaluation de l’interdiction de perturbation, les mesures compensatoires visant à améliorer les habitats des espèces concernées en d’autres lieux peuvent donc venir conforter la prévision selon laquelle la perturbation n’empêchera pas le maintien ou du moins le rétablissement d’une population suffisante. Étant donné qu’il s’agit toutefois d’une prévision, il peut être tenu compte, dans ce contexte, tant des mesures compensatoires déjà mises en œuvre que des mesures qui doivent encore l’être. À cet égard, de par leur nature, les mesures compensatoires ne peuvent certes pas être réalisées directement au lieu de la perturbation puisqu’il ait porté atteinte en ce lieu à la qualité de l’habitat. Elles doivent cependant être réalisées en un lieu ayant une proximité géographique étroite avec la perturbation car, dans le cas contraire, il faudrait s’attendre à ce que le niveau de la population des espèces concernées ne puisse pas être maintenu ou rétabli, du moins au niveau local.

3.      Réponse à la première question

61.      Il convient donc de répondre à la première question en ce sens qu’une perturbation des oiseaux qui conduit à une réduction de la population des espèces d’oiseaux perturbées n’est compatible avec l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » que si cette population demeure, en dépit de la perturbation, à un niveau suffisant ou s’il y a lieu de supposer que la perturbation n’empêchera pas de rétablir un niveau de population suffisant. Dans le cadre de l’appréciation de cette question, les États membres peuvent tenir compte des effets de mesures d’amélioration des habitats de l’espèce en un autre lieu.

B.      Deuxième question – Appréciation de l’efficacité des mesures compensatoires

62.      Par la deuxième question préjudicielle, la juridiction de renvoi souhaiterait savoir si tout doute scientifique quant à l’efficacité de mesures d’amélioration en d’autres lieux de l’habitat des espèces concernées doit être exclu en ce sens que l’évaluation technique, dûment motivée, d’un expert judiciaire suffit ou s’il faut au contraire une documentation scientifique objective attestant d’expériences pratiques positives avec ces mesures.

63.      Une documentation scientifique objective exigerait, à y regarder de plus près, deux études approfondies. Il faudrait, d’une part, identifier les effets préjudiciables de la perturbation sur la population des espèces concernées. Et il faudrait, d’autre part, constater les effets bénéfiques des mesures compensatoires sur ladite population. Les deux études nécessiteraient, notamment pour les habitats forestiers, une comparaison à long terme de la situation avant et après la mesure individuelle en cause. L’effet de la conservation du vieux bois et du bois mort dépend ainsi en particulier, et par la nature même des choses, de l’écoulement du temps. Et l’effet perturbateur du projet évoluera aussi avec le temps. En outre, l’évolution des deux objets de l’étude doit être isolée des autres facteurs comme les conditions météorologiques, la nourriture disponible ou les maladies.

64.      Comme le soulignent le gouvernement du Land de basse Autriche, la ville de Sankt Pölten et l’ASFINAG, même si de telles études devaient exister pour des situations similaires, un doute demeure quant au point de savoir dans quelle mesure leurs résultats pourraient être transposés.

65.      Il n’est donc pas surprenant que l’expert n’ait pas pu trouver d’étude qui réponde de manière définitive à la question de l’efficacité des mesures compensatoires litigieuses. Il n’existe que des études qui ont une certaine valeur indicative (26).

66.      Il y a donc lieu de préciser ci-après comment apprécier l’efficacité de mesures compensatoires. Il convient d’évoquer tout d’abord la prémisse de la juridiction de renvoi selon laquelle tout doute scientifique quant à l’efficacité des mesures compensatoires doit être exclu (voir sous 1), avant d’examiner ensuite les critères généraux du droit de l’Union pour l’appréciation de questions scientifiques complexes (voir sous 2).

1.      Exclusion des doutes scientifiques ?

67.      La juridiction de renvoi déduit de la jurisprudence de la Cour que tout doute scientifique raisonnable ou doute raisonnable du point de vue scientifique quant à l’efficacité de mesures compensatoires doit être exclu.

68.      Il n’y a aucune indication expresse dans l’article 5, sous d) ou d’autres dispositions de la directive « oiseaux », voire dans la jurisprudence, quant à l’applicabilité de ce critère à l’interdiction de perturbation. La Cour interprète cependant différentes autres dispositions dans le sens de ce critère en invoquant une lecture particulièrement stricte du principe de précaution consacré à l’article 191, paragraphe 2, TFUE (27). Il y a donc lieu d’examiner de plus près si ce critère restrictif est également applicable à l’appréciation de mesures compensatoires en lien avec l’interdiction de perturbation.

69.      J’exposerai néanmoins que, ni la jurisprudence relative à la disposition dérogatoire de l’article 16 de la directive « habitats » (voir sous a), la jurisprudence relative à l’autorisation des projets en vertu de l’article 6, paragraphe 3, deuxième phrase, de cette directive (voir sous b) ou la jurisprudence relative à l’article 14 de cette même directive (voir sous c) ne peut être transposée à l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux ».

a)      La jurisprudence relative à l’article 16 de la directive « habitats »

70.      On pourrait tout d’abord penser à la transposition de la jurisprudence relative à l’article 16 de la directive « habitats ». D’après cette disposition, le maintien ou le rétablissement des populations de l’espèce concernée dans un état de conservation favorable est une condition préalable à une dérogation aux interdictions visant à la protection des espèces prévues à l’article 12 de cette directive (28). L’État membre doit s’abstenir d’appliquer une telle dérogation si après avoir examiné les meilleures données scientifiques disponibles, une incertitude demeure quant au point de savoir si l’état de conservation favorable des populations d’une espèce menacée d’extinction peut être maintenu ou rétabli en dépit de cette dérogation (29).

71.      Cela vaut-il cependant aussi pour l’application de l’interdiction de perturbation en vertu de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » ? L’interdiction fait elle obstacle à un projet si après l’examen des meilleures données scientifiques disponibles et en dépit des mesures compensatoires, une incertitude demeure quant au point de savoir si une population suffisante des espèces d’oiseaux concernées peut être maintenue ou rétablie ?

72.      La condition du maintien ou du rétablissement d’un état de conservation favorable dans le contexte de l’application de l’article 16 de la directive « habitats » remplit une fonction similaire à celle de la condition de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » en vertu de laquelle la population des oiseaux concernés demeure à un niveau suffisant en dépit de la perturbation ou il y a lieu de supposer que la perturbation n’empêchera pas le rétablissement futur d’un niveau suffisant. Selon moi, tant que cette condition est remplie, le cas échéant du fait de mesures compensatoires, l’interdiction de perturbation ne vient pas s’appliquer.

73.      L’article 16 de la directive « habitats » est cependant une dérogation aux interdictions de l’article 12 et doit donc être interprétée de manière restrictive (30). C’est ce que la Cour exige en règle générale au sujet des dispositions dérogatoires parce qu’elle craint que les règles pour lesquelles des dérogations sont acceptées seront sinon vidées de leur substance (31). C’est à cette idée que correspond le critère d’examen restrictif qui exige d’exclure toute incertitude avant qu’une dérogation vienne s’appliquer.

74.      En revanche, une atteinte à la population des espèces d’oiseaux concernées ou à son potentiel de rétablissement est une condition d’application de l’interdiction de perturbation de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux ». La jurisprudence relative à l’article 16 ne peut donc pas être directement transposée.

b)      La jurisprudence relative à l’article 6, paragraphe 3, deuxième phrase, de la directive « habitats »

75.      La Cour n’interprète cependant pas que les dérogations en s’appuyant sur une lecture stricte du principe de précaution. Cette lecture trouve au contraire son origine dans l’interprétation de l’article 6, paragraphe 3, deuxième phrase, de la directive « habitats » à laquelle renvoie la juridiction de renvoi. D’après cette disposition, les autorités nationales compétentes ne marquent leur accord sur un plan ou projet qu’après s’être assurées qu’il ne portera pas atteinte à l’intégrité du site concerné.

76.      La Cour a jugé au sujet de cette disposition que les plans ou projets susceptibles d’affecter une zone de conservation ne peuvent être autorisés que lorsqu’il ne subsiste aucun doute raisonnable d’un point de vue scientifique quant à l’absence d’effets préjudiciables pour l’integrité de ce site (32).

77.      À la différence de l’article 6, paragraphe 3, deuxième phrase, de la directive « habitats », l’interdiction de perturbation de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » n’est pas formulée ainsi que des effets significatifs sur les objectifs de la directive doivent être exclus pour autoriser des perturbations. Il faut au contraire un constat positif de tels effets pour que l’interdiction de perturbation s’applique (33). La jurisprudence relative à l’article 6, paragraphe 3, deuxième phrase, ne peut donc pas non plus être directement transposée.

c)      La jurisprudence relative à l’article 14 de la directive « habitats »

78.      La jurisprudence relative à l’article 14, paragraphe 1, de la directive « habitats » est celle qui se rapproche le plus de celle relative à l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux ». D’après l’article 14, paragraphe 1, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que le prélèvement dans la nature de spécimens des espèces de la faune et de la flore sauvages, ainsi que leur exploitation, soit compatible avec leur maintien dans un état de conservation favorable.

79.      La Cour a interprété cette disposition en ce sens que l’État membre en cause doit s’abstenir d’autoriser le prélèvement ou l’exploitation d’une espèce lorsque, à l’occasion de l’examen des meilleures données disponibles, une incertitude demeure quant au point de savoir si cette exploitation est compatible avec le maintien de l’espèce dans un état de conservation favorable (34).

80.      L’article 14, paragraphe 1, de la directive « habitats » et l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » sont formulés de manière similaire parce que les deux réglementations requièrent une constatation positive au sujet du point de savoir si un prélèvement ou une exploitation, d’une part, et une perturbation, d’autre part, sont compatibles avec un état de conservation favorable ou une population suffisante de l’espèce concernée.

81.      Or, les différentes espèces protégées se distinguent nettement les unes des autres. L’article 14, paragraphe 1, de la directive « habitats » protège les espèces d’intérêt communautaire qui, d’après la définition à l’article 1er, sous g), de cette directive, sont particulièrement dignes de protection. À l’inverse, l’interdiction de perturbation de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » vaut pour tous les oiseaux quelle que soit leur vulnérabilité et de leur besoin de protection.

82.      En outre, de par sa nature, l’interdiction d’une perturbation simplement acceptée des oiseaux (35) va beaucoup plus loin que des restrictions aux prélèvements et exploitations d’espèces particulièrement dignes de protection. On accepte très souvent des perturbations des oiseaux tandis que le prélèvement ou l’exploitation d’espèces dignes de protection, et donc souvent rares, surviendront nettement moins souvent et reposent sur une décision consciente.

83.      Ces différences justifient de reconnaître un large champ d’application à l’article 14 de la directive « habitats », mais pas à l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux ».

d)      Résultat intermédiaire

84.      Je déduis de ce qui précède, qu’il ne suffit pas pour que l’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » s’applique, qu’après l’examen des meilleures données scientifiques disponibles, une incertitude ou un doute raisonnable demeure quant au point de savoir si un niveau de population suffisant de l’espèce d’oiseau concernée peut être maintenu ou rétabli. Il faut au contraire une constatation positive que la perturbation porte atteinte au niveau suffisant de la population des espèces d’oiseaux concernées ou empêche son rétablissement, avant que l’interdiction soit applicable.

2.      Critères du droit de l’Union pour la réalisation d’évaluations scientifiques complexes

85.      Les évaluations scientifiques complexes nécessaires à l’application de l’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » devraient être réalisées à l’aide des critères habituels.

86.      En ce sens, et ainsi que l’affirme la ville de St. Pölten, en l’absence d’une réglementation du droit de l’Union quant à l’évaluation de l’interdiction de perturbation, il y a lieu de citer en premier lieu le principe de l’autonomie procédurale des États membres. Étant donné que ce principe vaut également pour les questions de preuve (36), il est applicable à l’appréciation de l’efficacité de mesures compensatoires. C’est donc en principe aux États membres qu’il appartient de régler comment ces mesures doivent être appréciées.

87.      Les réglementations des États membres doivent néanmoins remplir la double condition de ne pas être moins favorables que celles régissant des situations similaires soumises au droit interne (principe d’équivalence) et de ne pas rendre impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par le droit de l’Union (principe d’effectivité) (37).

88.      Le principe d’effectivité signifie avant tout, s’agissant de l’interdiction de perturbation, que la preuve d’effets significatifs sur les objectifs de la directive « oiseaux » ne doit pas être rendue de manière indue excessivement difficile.

89.      Pour ce qui est du principe d’équivalence, différentes parties soulignent que les juridictions autrichiennes ont régulièrement recours à des avis scientifiques, dûment motivés, d’experts judiciaires.

90.      Il convient en outre de tenir compte d’autres principes du droit de l’Union comme le principe de bonne administration et le principe de précaution déjà mentionné.

91.      Les États membres doivent respecter le principe de bonne administration dans l’application du droit de l’Union, non pas sur le fondement de l’article 41 de la Charte (38), mais en tant que principe général de droit de l’Union (39). Ce principe exige d’une autorité administrative qu’elle procède, entre autres, à un examen diligent et impartial de tous les aspects pertinents afin de disposer, lors de l’adoption de sa décision, des éléments les plus complets et fiables possibles (40).

92.      En outre, des mesures fondées sur le principe de précaution, c’est-à-dire, en particulier, l’application de dispositions du droit de l’Union en matière d’environnement, présupposent généralement une évaluation complète des risques associés, fondée sur les données scientifiques disponibles les plus fiables et les résultats les plus récents de la recherche internationale (41). La Cour l’exige régulièrement, et à juste titre, dans le domaine de la protection de l’environnement (42) et en particulier pour la preuve que les conditions d’une dérogation à la réglementation de protection de la directive « oiseaux » sont remplies (43), sans pour autant invoquer expressément ces principes.

93.      Les constatations correspondantes doivent enfin être dûment motivées. Cela découle également du droit à une bonne administration (44) et est en outre consacré à l’article 6, paragraphe 9, de la Convention d’Aarhus (45) pour les décisions en matière d’environnement qui nécessitent la participation du public en vertu de l’article 6 de ladite convention. Mais, même le contrôle juridictionnel efficace des décisions et la protection juridictionnelle effective supposent que la juridiction saisie et les justiciables aient accès à la motivation de la décision attaquée, soit dans la décision, soit, à tout le moins, sur demande (46).

94.      Il convient donc de répondre à la deuxième question en ce sens que les évaluations scientifiques complexes nécessaires à l’application de l’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive « oiseaux » peuvent, dans les procédures juridictionnelles, être fondées sur les avis dûment motivés d’experts qui doivent eux-mêmes reposer sur les données scientifiques disponibles les plus fiables et les résultats les plus récents de la recherche internationale.

V.      Conclusion

95.      Je propose donc à la Cour de répondre comme suit à la demande de décision préjudicielle :

1)      Une perturbation d’oiseaux qui conduit à une réduction de la population de l’espèce d’oiseau perturbée n’est compatible avec l’article 5, sous d), de la directive 2009/147/CE concernant la conservation des oiseaux sauvages, que si cette population demeure, en dépit de la perturbation, à un niveau suffisant ou s’il y a lieu de supposer que la perturbation n’empêchera pas le rétablissement d’un niveau suffisant. Lors de l’appréciation de cette question, les États membres peuvent tenir compte des effets de mesures d’amélioration des habitats de l’espèce en un autre lieu.

2)      Les évaluations scientifiques complexes nécessaires à l’application de l’interdiction de perturbation au titre de l’article 5, sous d), de la directive 2009/147/CE peuvent, dans la procédure juridictionnelle, être fondées sur des avis dûment motivés d’experts qui doivent eux-mêmes reposer sur les données scientifiques disponibles les plus fiables et les résultats les plus récents de la recherche internationale.


1      Langue de l’original : l’allemand.


2      Directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages (JO 2010, L 20, p. 7).


3      Arrêt du 1er août 2025, Voore Mets et Lemeks Põlva (C‑784/23, EU:C:2025:609, point 49).


4      Directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO 1992, L 206, p. 7) dans la version modifiée par la directive 2013/17/UE du Conseil du 13 mai 2013 (JO 2013, L 158, p. 193).


5      Arrêt du 1er août 2025, Voore Mets et Lemeks Põlva (C‑784/23, EU:C:2025:609, point 49).


6      Voir mes conclusions dans l’affaire Voore Mets et Lemeks Põlva (C‑784/23, EU:C:2025:67, points 39, 40 et 47).


7      Mes conclusions dans l’affaire Voore Mets et Lemeks Põlva (C‑784/23, EU:C:2025:67, points 92 à 101).


8      Tout d’abord article 6 du règlement (UE) 2022/2577 du Conseil du 22 décembre 2022 établissant un cadre en vue d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables (JO 2022, L 335, p. 36) dans la version du règlement (UE) 2024/223 du Conseil du 22 décembre 2023 (JO L, 2024/223), plus tard article 15 quarter, paragraphe 1, article 15 sexies, paragraphes 2 et 4 ainsi que article 16 bis, paragraphe 5 de la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (JO 2018, L 328, p. 82) dans la version de la directive (UE) 2023/2413 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 modifiant la directive (UE) 2018/2001, le règlement (UE) 2018/1999 et la directive 98/70/CE en ce qui concerne la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, et abrogeant la directive (UE) 2015/652 du Conseil (JO L, 2023/2413).


9      Arrêt du 12 avril 2018, People Over Wind et Sweetman (C‑323/17, EU:C:2018:244).


10      Arrêt du 12 avril 2018, People Over Wind et Sweetman (C‑323/17, EU:C:2018:244, point 40).


11      Arrêt du 12 avril 2018, People Over Wind et Sweetman (C‑323/17, EU:C:2018:244, points 37 à 39).


12      C’est ainsi que je comprends l’arrêt du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Forêt de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, points 255 et 259).


13      Arrêts du 15 mai 2014, Briels e. a. (C‑521/12, EU:C:2014:330, point 28), et du 25 juillet 2018, Grace et Sweetman (C‑164/17, EU:C:2018:593, point 51).


14      Ainsi, au sujet de la protection des sites, arrêt du 7 novembre 2018, Coöperatie Mobilisation for the Environment e. a. (C‑293/17 et C‑294/17, EU:C:2018:882, point 125). L’arrêt du 26 avril 2017, Commission/Allemagne (Moorburg) (C‑142/16, EU:C:2017:301, point 38), rendu auparavant est toutefois à cet égard ambigu.


15      Arrêt du 1er août 2025, Voore Mets et Lemeks Põlva (C‑784/23, EU:C:2025:609, point 51).


16      Voir article 1er, sous i), de la directive « habitats » ainsi que mes conclusions dans l’affaire Eesti Suurkiskjad (C‑629/23, EU:C:2024:1029, en particulier points 43 à 46).


17      De manière similaire au sujet de la protection des sites d’après l’article 6, paragraphe 3, de la directive « habitats », arrêt du 21 juillet 2016, Orleans e. a. (C‑387/15 et C‑388/15, EU:C:2016:583, point 57).


18      Arrêts du 15 mai 2014, Briels e. a. (C‑521/12, EU:C:2014:330, point 32), du 21 juillet 2016, Orleans e. a. (C‑387/15 et C‑388/15, EU:C:2016:583, point 55), du 26 avril 2017, Commission/Allemagne (Moorburg) (C‑142/16, EU:C:2017:301, points 37 et 38), du 25 juillet 2018, Grace et Sweetman (C‑164/17, EU:C:2018:593, points 51 à 53), et du 7 novembre 2018, Coöperatie Mobilisation for the Environment e. a. (C‑293/17 et C‑294/17, EU:C:2018:882, point 126).


19      Arrêts du 15 mai 2014, Briels e. a. (C‑521/12, EU:C:2014:330, points 33 à 38), et du 21 juillet 2016, Orleans e. a. (C‑387/15 et C‑388/15, EU:C:2016:583, points 60 à 63).


20      Voir arrêt du 13 juin 2002, Commission/Irlande (Lagopède des saules) (C‑117/00, EU:C:2002:366, points 15 à 21).


21      Règlement (UE) 2024/1991 du Parlement européen et du Conseil du 24 juin 2024 relatif à la restauration de la nature et modifiant le règlement (UE) 2022/869 (JO L, 2024/1991).


22      En ce sens, voir arrêt du 23 mars 2006, Commission/Autriche (C‑209/04, EU:C:2006:195, point 43).


23      Arrêt du 10 mai 2007, Commission/Autriche (Transposition de la directive « Habitats » dans les Länder) (C‑508/04, EU:C:2007:274, point 115).


24      Arrêts du 14 juin 2007, Commission/Finlande (Chasse au loup) (C‑342/05, EU:C:2007:341, point 29), et du 10 octobre 2019, Luonnonsuojeluyhdistys Tapiola (C‑674/17, EU:C:2019:851, point 68).


25      Voir arrêt du 14 juin 2007, Commission/Finlande (Chasse au loup) (C‑342/05, EU:C:2007:341, point 26) et mes conclusions dans l’affaire Commission/Finlande (Chasse au loup) (C‑342/05, EU:C:2006:752, point 44).


26      Voir, par exemple, Michalek, K. G., Auer, J. A., Großberger, H., Schmalzer, A., & Winkler, H. (2001), Die Einflüsse von Lebensraum, Witterung und Waldbewirtschaftung auf die Brutdichte von Bunt-und Mittelspecht (Picoides major und P. medius) dans Wienerwald, Abhandlungen und Berichte aus dem Museum Heineanum, 5, p. 31 à 58, ou Mollet, P., Zbinden, N., & Schmid, H. (2009), Steigende Bestandszahlen bei Spechten und anderen Vogelarten dank Zunahme von Totholz ?| An increase in the population of woodpeckers and other bird species thanks to an increase in the quantities of deadwood ?, Schweizerische Zeitschrift für Forstwesen, 160(11), p. 334 à 340.


27      Voir au sujet des arrêts évoqués ci-après, relatifs à la directive « habitats » et allant plus loin au sujet du droit des déchets, arrêt du 24 octobre 2019, Prato Nevoso Termo Energy (C‑212/18, EU:C:2019:898, point 58), et au sujet de la directive 2010/75/UE du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles (JO 2010, L 334, p. 17) arrêt du 9 mars 2023, Sdruzhenie „Za Zemyata – dostap do pravosadie“e. a. (C‑375/21, EU:C:2023:173, point 53). Voir à ce sujet aussi Sobotta, C. (2020), « Recent applications of the precautionary principle in the jurisprudence of the CJEU – a new yardstick in EU environmental decision making ? », ERA Forum Vol. 21, p. 723.


28      Voir ci-dessus, points 55 à 57.


29      Arrêt du 10 octobre 2019, Luonnonsuojeluyhdistys Tapiola (C‑674/17, EU:C:2019:851, points 66, 68 et 69).


30      Arrêts du 20 octobre 2005, Commission/Royaume-Uni (Transposition de la directive Habitats) (C‑6/04, EU:C:2005:626, point 111), et du 10 octobre 2019, Luonnonsuojeluyhdistys Tapiola (C‑674/17, EU:C:2019:851, point 30). Voir aussi mes conclusions dans l’affaire ASCEL (C‑436/22, EU:C:2024:83, point 66).


31      Arrêts du 12 juillet 1962, Acciaierie Ferriere e Fonderie di Modena/Haute autorité (16/61, EU:C:1962:29, p 575), du 14 décembre 1962, Commission/Luxembourg et Belgique (2/62 et 3/62, EU:C:1962:45, p. 830), et du 30 avril 2024, Procura della Repubblica presso il Tribunale di Bolzano (C‑178/22, EU:C:2024:371, point 48).


32      Arrêts du 7 septembre 2004, Waddenvereniging et Vogelbeschermingsvereniging (C127/02, EU:C:2004:482, points 58 et 59), du 17 avril 2018, Commission/Pologne (Fôret de Białowieża) (C‑441/17, EU:C:2018:255, point 117), et du 15 juin 2023, Eco Advocacy (C‑721/21, EU:C:2023:477, point 38).


33      Voir mes conclusions dans l’affaire ASCEL (C‑436/22, EU:C:2024:83, point 67) et dans l’affaire PAN Europe/Commission (C‑316/24 P, EU:C:2025:422, points 117 et 128).


34      Arrêts du 29 juillet 2024, ASCEL (C‑436/22, EU:C:2024:656, point 72), et du 12 juillet 2025, Eesti Suurkiskjad (C‑629/23, EU:C:2025:429, point 42).


35      Arrêt du 1er août 2025, Voore Mets et Lemeks Põlva (C‑784/23, EU:C:2025:609, point 49).


36      Arrêts du 21 juin 2017, W e. a. (C‑621/15, EU:C:2017:484, point 25), et du 6 octobre 2020, La Quadrature du Net e. a. (C‑511/18, C‑512/18 et C‑520/18, EU:C:2020:791, points 222 et 223).


37      Arrêts du 16 décembre 1976, Rewe-Zentralfinanz et Rewe-Zentral (33/76, EU:C:1976:188, point 5), du 15 avril 2008, Impact (C‑268/06, EU:C:2008:223, points 44 et 46), et du 19 décembre 2019, Deutsche Umwelthilfe(C‑752/18, EU:C:2019:1114, point 33).


38      Arrêts du 17 juillet 2014, YS e. a. (C‑141/12 et C‑372/12, EU:C:2014:2081, point 67), et du 17 décembre 2015, WebMindLicenses (C‑419/14, EU:C:2015:832, point 83).


39      Arrêts du 8 mai 2014, N. (C‑604/12, EU:C:2014:302, points 49 et 50), du 14 mai 2020, Agrobet CZ (C‑446/18, EU:C:2020:369, point 43), et du 22 septembre 2022, Országos Idegenrendészeti Főigazgatóság e. a. (C‑159/21, EU:C:2022:708, point 35).


40      Arrêts du 14 mai 2020, Agrobet CZ (C‑446/18, EU:C:2020:369, point 44), et du 21 octobre 2021, CHEP Equipment Pooling (C‑396/20, EU:C:2021:867, point 48).


41      En ce sens, arrêts du 28 janvier 2010, Commission/France (C‑333/08, EU:C:2010:44, point 92), du 1er octobre 2019, Blaise e. a. (C‑616/17, EU:C:2019:800, point 46, voir également points 93 et 94), et du 9 novembre 2023, Global Silicones Council e. a./Commission (C‑558/21 P, EU:C:2023:839, point 66).


42      Voir par exemple arrêts du 7 septembre 2004, Waddenvereniging et Vogelbeschermingsvereniging, (C‑127/02, EU:C:2004:482, point 54), et du 12 juin 2025, Eesti Suurkiskjad (C‑629/23, EU:C:2025:429, point 42).


43      Arrêts du 23 avril 2020, Commission/Finlande (Chasse printanière de l’eider à duvet) (C‑217/19, EU:C:2020:291, point 70), et du 17 mars 2021, One Voice et Ligue pour la protection des oiseaux (C‑900/19, EU:C:2021:211, point 30).


44      Arrêts du 8 mai 2019, PI (C‑230/18, EU:C:2019:383, point 57), du 24 novembre 2020, Minister van Buitenlandse Zaken (C‑225/19 et C‑226/19, EU:C:2020:951, point 34), et du 24 février 2022, SC Cridar Cons (C‑582/20, EU:C:2022:114, point 54).


45      Convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (JO 2005, L 124, p. 4), conclue par la décision 2005/370/CE du Conseil du 17 février 2005 (JO 2005, L 124, p. 1).


46      En ce sens, arrêts du 15 octobre 1987, Heylens e. a. (222/86, EU:C:1987:442, point 15), et du 30 avril 2009, Mellor (C‑75/08, EU:C:2009:279, point 59). Voir aussi mes conclusions dans l’affaire Holohan e. a. (C‑461/17, EU:C:2018:649, Nr. 65).