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          Astrid Epiney
        
        
          Troisième séance de travail — Les perspectives
        
        
          des conséquences négatives sur le niveau global des prestations. Selon
        
        
          la Cour, il est ainsi «légitime» pour un État membre de n’octroyer cer-
        
        
          taines prestations qu’à la condition que le bénéficiaire ait démontré un
        
        
          «certain degré d’intégration dans la société de cet État» — la propor-
        
        
          tionnalité de la mesure étant toujours requise (
        
        
          36
        
        
          ). La Cour semble tou-
        
        
          tefois indiquer que les considérations propres à l’intégration en tant
        
        
          que telle ne peuvent pas constituer une raison justificative, respecti-
        
        
          vement une considération objective; il est en effet nécessaire que l’État
        
        
          membre invoque une autre raison justificative (par exemple l’équilibre
        
        
          financier de la prestation en cause) et l’intégration dans l’État membre
        
        
          ne constitue alors qu’un critère objectif invocable pour limiter le cercle
        
        
          des ayants droit à la prestation.
        
        
          Cette approche est convaincante: au vu du statut de citoyen euro-
        
        
          péen et des droits qui en découlent, il est en effet difficilement conce-
        
        
          vable que l’intégration puisse constituer un objectif propre à justifier
        
        
          une discrimination en raison de la nationalité. Un tel point de vue
        
        
          signifierait en effet qu’un traitement moins favorable des ressortis-
        
        
          sants d’autres États membres pourrait en principe toujours être justi-
        
        
          fié, puisque ceux-ci sont par définition moins bien intégrés dans l’État
        
        
          d’accueil que les nationaux. Cette approche serait en définitive diamé-
        
        
          tralement opposée à la conception de la citoyenneté européenne défen-
        
        
          due par la Cour et ancrée dans le traité.
        
        
          4.
        
        
          
            Conclusion
          
        
        
          Les réflexions exposées ci-dessus ont pu démontrer que l’arrêt
        
        
          Van Gend
        
        
          en Loos
        
        
          a effectivement constitué un point de départ pour le développement
        
        
          de la citoyenneté européenne telle qu’on la connaît à l’heure actuelle et le déve-
        
        
          loppement de ce concept n’est a fortiori pas imaginable sans les bases établies
        
        
          en 1963 par cet arrêt. Ces principes — notamment la possibilité de déduire des
        
        
          droits individuels directement du droit de l’Union — doivent cependant être
        
        
          continuellement appliqués et concrétisés lors de l’interprétation des disposi-
        
        
          tions régissant la citoyenneté européenne, par exemple lorsqu’il est fait appel
        
        
          à l’effet utile pour déterminer la portée des droits individuels. Cela conduit
        
        
          par conséquent à une évolution considérable du droit de l’UE, de sorte que les
        
        
          (
        
        
          36
        
        
          ) Voir CJUE, aff. C-209/03
        
        
          (Bidar),
        
        
          Rec. 2005, I-2119, points 56 ss; voir également CJUE,
        
        
          aff. C-158/07
        
        
          (Förster),
        
        
          Rec. 2008, I-8507; CJUE, aff. C-103/08
        
        
          (Gottwald),
        
        
          Rec. 2009, I-9117;
        
        
          CJUE, aff. C-75/11
        
        
          (Commission/Autriche),
        
        
          arrêt du 4 octobre 2012, points 57 ss.