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Astrid Epiney
Troisième séance de travail — Les perspectives
dans le sens où il couvre (seulement) les situations dans lesquelles le
refus d’octroyer un droit de séjour pour un ressortissant d’un État tiers
(membre de la famille d’un citoyen européen) implique la méconnais-
sance de l’effet utile reconnu à la citoyenneté européenne (
28
).
Le droit des citoyens européens de circuler et de séjourner sur le
territoire des États membres est ainsi un véritable droit fondamental
applicable indépendamment d’un quelconque lien d’extranéité dès lors
que «l’essentiel des droits conférés»
(«Kernbestand»)
par la citoyenne-
té européenne est touché (cette question avait pu être laissée ouverte
dans l’arrêt
Zhu et Chen
car l’enfant concerné avait la nationalité d’un
autre État membre que celui de résidence). Il reste cependant à définir
à quelles conditions l’essentiel des droits conférés par la citoyenneté
européenne est effectivement touché; la Cour semble considérer ici
la présence d’une obligation de fait de quitter le territoire de l’Union
comme déterminante. De plus, si le cas d’enfants mineurs, ressortis-
sants d’un État membre, et de leurs parents, ressortissants d’États tiers,
constitue le cas d’application le plus clair et le plus fréquent, d’autres
situations ne semblent pas devoir être exclues d’emblée, par exemple
celle d’une personne dépendante de soins prodigués par un proche.
Par ailleurs, la question de la détermination de l’âge à partir duquel un
enfant (mineur) ne doit plus être considéré comme ayant besoin de ses
parents reste également ouverte. Si le point de départ pour répondre à
ces questions est — comme la Cour l’a souligné — l’effet utile des droits
conférés par la citoyenneté européenne, il semble que la formulation
de critères généraux et abstraits ne saurait satisfaire aux exigences du
droit de l’Union; il convient en effet davantage de se demander dans
chaque situation concrète si la mesure nationale entraîne une obliga-
tion de fait de quitter le territoire de l’Union.
La CJUE n’a, jusqu’ici, pas eu à se prononcer sur la question d’un
refus, pour des raisons d’ordre et de sécurité publics, de l’octroi d’un
droit de séjour à un ressortissant d’État tiers, membre de la famille
d’un citoyen européen (et qui implique que le citoyen européen est
obligé de quitter le territoire de l’Union): puisqu’une telle limitation est
possible dans le cadre des droits fondamentaux et des libertés fonda-
mentales, de bonnes raisons semblent ici plaider en faveur de la compa-
tibilité d’une telle mesure avec le droit de l’Union, la mesure nationale
(
28
) CJUE, aff. C-256/11
(Dereci),
arrêt du 15 novembre 2011, point 67.
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