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First working session — The judgment
impressionnante», selon les mots utilisés par l’avocat général Roemer dans
ses conclusions, que «les traités européens constituent une innovation pro-
fonde
(eine tiefgehende Neuerung)
et qu’il serait faux de ne les examiner qu’à la
lueur des principes généraux du droit des gen
s
» (Roemer soulignait le
«nur
im
Lichte»
[seulement à la lumière], rendu dans la traduction officielle par «qu’à la
lueur»). On sait que c’était précisément le cœur des discussions déjà engagées
dès la signature des traités de Rome, à partir du congrès de Stresa (
25
), entre les
juristes qui s’intéressaient au droit communautaire, notamment dans le cadre
de la FIDE et en particulier au sein de sa section néerlandaise, où les avocats
de la société Van Gend en Loos étaient particulièrement actifs. Je n’insisterai
pas plus sur ce point puisque l’essentiel des exposés qui suivent sont précisé-
ment consacrés à cet «ordre juridique nouveau». Il faut toutefois indiquer que,
dès les jours qui suivirent la lecture de l’arrêt, les réactions ne se sont guère
attachées à une exégèse, ni même à une interprétation plus complexe, de l’arrêt
lui-même, mais plutôt aux concepts qui avaient été développés en particulier
par Michel Gaudet dans les observations de la Commission.
5.
Le débat sur la primauté du droit
communautaire dans les réactions à l’arrêt
Les réactions à l’arrêt
Van Gend en Loos
ne se sont pas limitées à la ques-
tion de l’
«ordre juridique nouveau»,
elles ont également porté sur la question
de la primauté du droit communautaire.
Avant même le déclenchement de l’affaire
Costa/ENEL,
dans la seconde
moitié de l’année 1963, un grand nombre de commentateurs ont fait valoir
que la primauté du droit communautaire devait être la conséquence de la
jurisprudence
Van Gend en Loos;
le vocabulaire n’était pas fixé — il ne le
sera qu’avec le choix du terme «primauté» par la convention européenne en
2002 —, et on parlait aussi bien de prévalence, de priorité, voire de supréma-
tie. Il n’y a rien d’étonnant aux réactions à l’arrêt
Van Gend en Loos
— alors
que celui-ci consacra le principe de l’applicabilité directe et non celui de la
primauté, confirmé par l’arrêt du 15 juillet 1964 dans l’affaire 6/64,
Costa/
ENEL
—, puisque la problématique des rapports entre droit communautaire
et droit interne avait été soumise à l’attention de la Cour non seulement dans
les observations présentées par la Commission au cours de la procédure, mais
(
25
) Voir Bailleux, J., «Comment l’Europe vint au droit. Le premier congrès international
d’études de la CECA (Milan-Stresa 1957)»,
Revue française de science politique,
vol. 60, n
o
2,
2010, p. 295 et suiv.