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Jean-Paul Jacqué
Troisième séance de travail — Les perspectives
l’Union d’être la seule partie à l’accord à se voir imposer un effet direct
des règles de l’OMC. En fait, le vrai problème est celui de la situation
des particuliers victimes des sanctions et, à cet égard, on peut regretter
que la Cour refuse d’admettre la mesure de réparation qu’aurait consti-
tuée la reconnaissance de la responsabilité sans faute (
7
).
3) La protection des droits fondamentaux est au cœur du débat sur les
rapports entre différents systèmes. Plus que toute autre, la question
des droits fondamentaux est un point de rencontre, et éventuellement
de conflits, entre des ordres juridiques différents. L’existence de plu-
sieurs degrés de protection, au niveau constitutionnel national, à celui
de l’Union et dans le cadre de la Convention européenne des droits
de l’homme (CEDH), a imposé une harmonisation des rapports entre
ceux-ci. Le problème aurait été sans doute plus facile à résoudre sans
l’existence, due à la nature spécifique de l’Union, d’une zone grise, celle
dans laquelle les États membres interviennent dans le champ d’appli-
cation du droit de l’Union. C’est le lieu privilégié des conflits en cas
de différence entre la protection offerte par le droit de l’Union et celle
prévue par le droit constitutionnel national. Mais aussi, c’est par ce
biais que la CEDH peut entrer en conflit avec le droit de l’Union. Après
l’arrêt
Solange I
de la Cour constitutionnelle allemande, la Cour de jus-
tice a su résoudre la question, sur un plan théorique, en instaurant une
protection des droits fondamentaux au titre des principes généraux du
droit tels qu’ils résultent des traditions constitutionnelles communes
aux États membres et de la CEDH. Par la voie d’une «incorporation» de
ces sources dans le droit communautaire, le risque de conflit était affai-
bli, mais ne disparaissait pas totalement. La reprise de la jurisprudence
dans l’article 6 du traité sur l’Union européenne (TUE) ancrait cette
solution dans le droit primaire. L’adoption de la charte des droits fon-
damentaux de l’Union européenne (la « Charte ») puis son élévation au
rang de droit primaire allaient dans le même sens, comme en attestent
les dispositions générales de celle-ci. Mais, ici encore, toute éventualité
de conflit n’était pas exclue.
4) S’agissant du droit constitutionnel national, la Cour a été amenée à
clarifier les dispositions de la Charte en établissant un équilibre entre
le principe de primauté et le droit constitutionnel national. Lorsque
(
7
) Arrêt du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission (C120/06 P et C121/06 P,
Rec. p. I6513).