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Jean-Victor Louis
CONCLUSIONS générales
des ressortissants des États membres» (
37
). Le rapporteur analyse, en particu-
lier, les conditions d’accès et de perte de la citoyenneté européenne, le droit à
la libre circulation et l’interdiction de discrimination selon la nationalité. On
sait les analyses jugées parfois subtiles et audacieuses (
38
) auxquelles ont donné
lieu des arrêts dont la solution n’était pas évidente.
Nous voudrions renvoyer à un arrêt plus ancien qui paraît illustratif de
l’emprise du droit de l’Union sur la souveraineté des États membres, à en juger
par la portée des observations des gouvernements dans cette affaire: l’arrêt
Rottmann
(
39
),
qui soumet à un contrôle de proportionnalité le retrait de la
nationalité à un individu qui s’était fait frauduleusement naturaliser. Cette
exigence de contrôle est formulée parce que la perte de nationalité entraîne
celle de la citoyenneté de l’Union. L’État, chose remarquable, voit sa «souverai-
neté» limitée dans l’exercice de sa compétence, reconnue en droit internatio-
nal, en matière d’octroi et de retrait de sa nationalité… Cela n’empêche pas de
se poser une question, comme le fait M
me
Epiney: quelle est la valeur ajoutée de
la citoyenneté en ce qui concerne l’étendue des droits garantis? C’est, conclut-
elle, ce lien spécifique entre les citoyens et le droit de l’Union que constitue
la citoyenneté. On peut prédire de nouveaux développements de la jurispru-
dence à cet égard.
(
37
) Voir arrêt du 20 septembre 2001, C-184/99,
Grzelczyk
, point 31.
(
38
) D’aucuns n’ont-ils pas hésité à considérer, à propos de l’arrêt
Ruiz Zambrano
, du 8 mars 2011,
aff. C-34/09, que «la citoyenneté sert ici de ‘cheval de Troie’ à une hypothèse supplémentaire
de protection des droits fondamentaux (en l’occurrence, celui du respect de la vie privée
et familiale [note de l’auteur])». Voir Dubout, É., «L’objectif de protection des droits
fondamentaux et la répartition des compétences dans l’Union européenne: la confrontation
des logiques constitutionnelles», dans
Objectifs et compétences dans l’Union européenne
,
sous la direction de Eleftheria Neframi, Colloques, Bruylant, Bruxelles, 2013, p. 368-411,
spécialement, p. 388. Cet auteur relève que l’objectif de protection des droits fondamentaux
en est venu à menacer l’impératif de respect des compétences d’attribution (p. 368) ou
encore (p. 370): «Si la compétence ne se pense pas sans objectif, l’objectif se dispense ici de
la compétence.» Pourtant, avec l’entrée en vigueur de la charte des droits fondamentaux
et de son article 51, on peut penser que la pratique de la Cour ne fera que s’amplifier. Voir
une somme sur la question de la citoyenneté, Gastaldi, S.,
Citoyenneté de l’Union et libre
circulation: du critère économique au statut unique
, Dossiers de droit européen, Helbing
Lichtenhahn, LGDJ, Bâle, Paris, 2013, 753 p., qui dégage un programme de développement
du concept. Voir aussi Lenaerts, K., «The concept of EU citizenship in the case law of the
European Court of Justice»,
ERA Forum
, 4/13, Trêves, 2013, p. 569-583.
(
39
) Arrêt du 2mars 2010, C-135/08. La Cour s’y réfère à ce qu’elle a dit dans des arrêts précédents,
cités par M
me
Epiney, où elle avait indiqué que «les États membres doivent, dans l’exercice de
leur compétence en matière de nationalité, respecter le droit de l’Union».
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