QD30136442AC - page 221

215
CONCLUDING REMARKS
L’autonomie se traduit aussi par le développement, par la Cour, de notions
autonomes dans l’interprétation du droit de l’Union, ce qui contribue néces-
sairement au développement du droit de l’intégration.
Le principe de primauté du droit de l’Union ne céderait, pour le professeur
Pernice, que si celle-ci se voyait accusée, par hypothèse, de bouleverser les fon-
dements constitutionnels de l’État. Un cas conçu comme si dramatique, est-il
ajouté, ne paraît pouvoir se conclure que par une sortie de l’Union (
25
). Dans
une hypothèse aussi exceptionnelle, voire extravagante, qui reflète une crise
ouverte, l’on voit resurgir le substrat international qui s’impose au détriment
de la loyauté envers l’Union. Il est des limites à ce que peut le droit, comme l’a
indiqué le professeur Szpunar dans son intervention.
Deux observations complémentaires paraissent utiles sur ce thème: le
principe de primauté est vu comme le reflet du principe d’égalité — la loi de
l’Union, sauf différentiation programmée, doit être la même pour tous. Elle
ne l’est pas si une règle unilatérale prévaut. Le refus de reconnaître que la
primauté traduit une hiérarchie des normes impliquant la prédominance de
la loi commune restera sans doute l’un des éléments fondamentaux de la doc-
trine pluraliste dominante. Je me risque cependant à évoquer avec nostalgie la
motivation, certes exprimée en termes désuets, qui était celle de la Cour supé-
rieure de Luxembourg dans son arrêt célèbre du 14 juillet 1954,
Chambre des
Métiers/Pagani
. Ladite Cour y
qualifiait un traité international de «loi d’une
essence supérieure ayant une origine plus haute que la volonté d’un organe
interne» (
26
). De même, ne serait-il pas logique que la «perméabilité» entre les
ordres juridiques soit étendue aux relations horizontales entre États membres,
dont les règles fondamentales et les catalogues de droits permettraient aisé-
ment une telle ouverture. Celle-ci contribuerait à l’émergence de principes
généraux du droit de l’Union qui synthétiserait des principes consacrés plus
spécifiquement dans l’une ou l’autre Constitution mais dont la portée ne se
limite pas à celles-ci.
(
25
) Voir sur le retrait, ad generalia, Weerts, J., «L’évolution du droit de retrait de l’Union
européenne et sa résonance sur l’intégration européenne»,
Cahiers de droit européen
, 2012,
p. 345-407. D’autres auteurs envisagent des hypothèses moins dramatiques «afin
qu’au sein
de l’unité du droit de l’Union
une véritable échelle de pluralité des droits constitutionnels
soit progressivement aménagée». C’est nous qui soulignons. Voir Dubout, É., «Le niveau de
protection des droits fondamentaux dans l’Union européenne: unitarisme constitutif
versus
pluralisme constitutionnel. Réflexions autour de l’arrêt
Melloni
», à paraître dans les
Cahiers
de droit européen
, 2013, 2.
(
26
) Voir
Les règlements
…, op. cit., p. 415.
1...,211,212,213,214,215,216,217,218,219,220 222,223,224,225,226,227,228,229,230,231,...328
Powered by FlippingBook